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Grandes Puissances en Afrique : la RDC entre Charybde et Scylla (opinion)

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Georges Lohalo est doctorant en Relations Internationales à Central China Normal University. Il étudie le système international post-guerre froide, les relations sino-américaines et la coopération Chine-Afrique. Il a un diplôme de Maitrise en Relations Internationales de l’Université des Affaires Etrangères de Chine (外交学院), une licence en Politique Internationale de l’Université de Kinshasa et est auteur de plusieurs œuvres d’esprit. georgeslohalo@gmail.com

Grandes Puissances en Afrique : la RDC entre Charybde et Scylla

Opinion de  Georges Lohalo

Jusqu’en 1482, avant la grande nuit, le territoire de l’actuelle République Démocratique du Congo était habité par des peuples libres issus des royaumes, empires et clans différents. Ils vivaient de période longue en harmonie parfaite. Certains royaumes devinrent prospères à l’instar de Kongo, Luba, Lunda etc. Des progrès en commerce, diplomatie, industrie, religion…étaient constatés par les premiers Portugais qui foulèrent les pieds dans cette vaste étendue au cœur de l’Afrique centrale. Des échanges naquirent depuis avec les européens.

De ces interactions commencèrent des pratiques bien peu catholique notamment celles de la vente des esclaves puis de l’obligation imposées par les amis d’autres fois aux congolais, d’extraire par la force le caoutchouc. De 1885 à 1908, entre 10 à 15 millions de congolais périrent dans cette servitude imposée par l’oppresseur. Les clauses de la conférence de Berlin des grandes puissances ne changèrent guère la situation. Il est de notoriété publique que les pratiques de la colonisation qui suivirent dans notre pays étaient les plus sévères de toute l’Afrique. Le Congo, par la lutte des Pères fondateurs, devint indépendant le 30 juin 1960.

Loin d’être mélancolique, ce rappel historique pose là les germes à la fois de notre histoire douloureuse mais bien aussi ceux de nos interactions avec les grandes puissances. Le Congo obtint son indépendance dans un contexte particulier de la Guerre dite Froide du moins au centre ; mais chaude dans la périphérie. D’ailleurs nous allons le payer CASH avec la mort de Lumumba, l’un des Pères fondateurs de notre Nation à cause de son prétendu rapprochement avec l’URSS. Faut-il rappeler que depuis la Conférence de Berlin, notre pays a fait consensus comme entité commune ? Mais d’abord et avant tout pour ces puissances-là. Et donc pour elles,  ce paradigme doit demeurer ainsi !

La suite des événements majeurs de notre pays ne sera que la conséquence de cette obédientisation forcée. D’abord, Mobutu, lui-même soutenu par la communauté occidentale écarta Kasa-Vubu, un autre Père Fondateur, avec vœux de diriger les civils pour 5 ans. Hélas, l’appétit l’emporta et règnera en maitre absolu 32 ans durant. Ses moments de rebond nationaliste n’ont pas pu changer le paradigme en ceci que tout était mis en place pour ne respecter que le paradigme de 1885. Mobutu désavoué, se verra déposséder non seulement de son pouvoir et orgueil mais surtout mourra en dehors du Zaïre.

Lors de son discours du 30 juin 2020, le Président de la République Félix Tshisekedi Tshilombo, après éloges mérité aux Pères fondateurs de notre Nation, a déclaré qu’il entretient une relation privilégiée et un partenariat stratégique avec les États-Unis  d’Amérique. Pour les observateurs de tous bords, ceci est la reproduction ou la continuité du paradigme de 1885. Il n’est pas étonnant que l’Amérique ait reconnu en premier l’existence de l’EIC avant les délibérations de la dite conférence.

En 1997, l’AFDL soutenue largement par les multinationales américaines dépose Mobutu et Mzee prend le pouvoir. Quelques mois plupart, ces mêmes multinationales ont soutenu d’autres groupes armés avec objectif de saboter l’action nationaliste de Mzee Kabila de rendre le Congo aux Congolais comme le voulait Lumumba. Cette autre guerre qui éclate le 2 août 1998 plongera le pays dans une situation inévaluable économiquement, socialement, politiquement etc. Ce drame de trop causera la mort de plus de 8 millions de morts selon diverses statistiques. Toutes les tentatives de redémarrage du pays n’ont pas été soutenues par les partenaires traditionnels, malgré les demandes exprès des autorités du pays.

Aujourd’hui, il se trouve qu’un autre pays a investi, depuis 2007, des milliards de dollars américains dans notre pays. Ce nouveau pays s’appelle la République Populaire de Chine. Un pays de loin différent des USA et des États Européens c’est-à-dire de toutes les puissances qui avaient siégé à Berlin pour se partager l’Afrique à cause du Congo bien entendu.

Ce pays est compté aujourd’hui comme premier partenaire économique et commercial de la RDC. La communauté Chinoise est la plus grande et il y a beaucoup d’investissements des entreprises privées mais aussi de l’État chinois dans le secteur minier dans notre pays.

C’est là l’enjeu. Le sous-sol congolais renferme des minerais stratégiques de Notre temps. Toutes les grandes puissances veulent y accéder. Cette rivalité n’est pas nouvelle. En 1960, les USA avaient supprimé Lumumba parce qu’ils craignaient que les russes accèdent aux mines de Cobalt. Non seulement le Cobalt demeure un minerais stratégique mais il y aussi le Coltan, Lithium etc qui concourent à la technologie de 5G, à la transition énergétique et à toutes sortes de technologies dites de l’économie vert. La Chine est les USA sont effectivement en guerre économique et technologique à cause de ces technologies. Toute accession à ces métaux est un enjeu. Le Congo est donc au cœur des jeux de puissant comme autant des caoutchoucs, de l’Uranium qui met fin à la guerre mondiale, etc. Lire aussi:

Pourquoi l’actuelle compétition Sino-Américaine n’est-elle pas une guerre froide ?( Tribune de Georges Lohalo)

En 60 ans donc, il faut tirer les leçons de l’histoire. En 1960, le Congo avait, disons-le, choisit son camp, qu’avons-nous gagné ? Faut-il reprendre la même politique aujourd’hui ? Depuis son arrivée au pouvoir le Président de la République a visité plus de 20 pays au monde mais pas encore la Chine qui reste, jusqu’aujourd’hui, le premier partenaire économique et commercial du Congo. Le Second est un pays africain : Zambie. Il y a là un questionnement impérieux. La République Démocratique du Congo devrait s’interroger profondément avant d’orienter sa politique étrangère. Il me semble évident qu’il y a des impératifs sécuritaires dont les USA pourraient apporter leur appui mais aussi des défis économino-infrastructurels que la Chine pourrait être utile. Ceci requiert tact, l’habileté et surtout stabilité politique interne. On peut éviter les erreurs du passé en définissant notre intérêt National, en identifiant les obstacles et proposant le leadership qui convient. Lire à ce propos:

Dans cette optique, la RDC, à partir de maintenant, est influencée par cette dynamique Chine-USA. La RDC naviguerait dans des eaux dangereuses lesquelles il y a d’un côté Charybde et de l’autre Scylla terrorisant et influençant notre politique étrangère. Ce dilemme est celui de confrontation entre les grandes puissances et leur impact dans les Etats faibles. Il peut être appliqué dans toute région, pays, cité pour décrire le scénario du genre.

Georges Lohalo

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