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Human Rights Watch déplore la répression contre les médias en RDC(Rapport)

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L’administration du président Félix Tshisekedi en République Démocratique du Congo est accusée d’avoir réprimée, de façon croissante, les médias et les activistes de la société civile depuis son entrée en fonction il y a deux ans. C’est Human Rights Watch qui le dit dans un document rendu public le jeudi 28 janvier 2021.

Malgré quelques mesures initiales visant des avancées en matière de droits humains, les autorités congolaises sont accusées par HRW d’avoir menacé, arrêté
arbitrairement, détenu et poursuivi des dizaines de journalistes, d’activistes et d’autres personnes jugées critiques à l’égard du gouvernement. « Les Congolais ne devraient pas avoir à craindre d’être harcelés ou arrêtés pour avoir émis des critiques ou manifesté pacifiquement contre la politique du gouvernement », a indiqué Thomas Fessy, chercheur principal sur la RD Congo chez Human Rights Watch. Il note que « deux ans plus tard, les engagements de Félix Tshisekedi à respecter les droits humains commencent à sonner creux. »

Human Rights Watch s’est entretenu avec 83 personnes par téléphone entre janvier 2020 et janvier 2021. Ce sont notamment des victimes d’abus, des avocats, des activistes de droits de l’homme et des journalistes.
Les chercheurs ont recensé au moins 109 cas d’arrestations arbitraires et de harcèlement au cours de l’année passée. Bon nombre de victimes sont des journalistes, qui ont subi des intimidations, des menaces et parfois ont été passés à tabac. Des agents de l’Agence nationale de renseignements (ANR) sont impliqués dans au moins 16 cas.

Les leaders pro-démocratie victimes de harcèlement

L’un des cas les plus récents concerne huit jeunes militants pro-démocratie du mouvement citoyen la Lucha, détenus pendant un mois dans la ville de Beni, après qu’ils ont participé le 19 décembre à une marche appelant à la paix dans la région et dénonçant le manque de protection des civils. Après un tollé général, le tribunal militaire les a acquittés le 20 Janvier 2021.

Le Gouverneur du Sankuru sur la liste noire de Human Rights Watch

Human Rights Watch rappelle que le 20 août 2020, à Lodja dans la province du Sankuru, des soldats et des policiers ont fait irruption dans le bureau de la station privée Radio Losanganya et ont arrêté Hubert Djoko, journaliste, et Albert Lokongo, technicien radio, les accusant de soutenir le rival politique de longue date du Gouverneur de cette province, Joseph Stéphane Mukumadi. Ils les ont ensuite conduits au stade où le gouverneur tenait un meeting. « Ils nous ont fouettés et nous ont fait répéter ce que nous avons dit à l’antenne », a expliqué Hubert Djoko. Et de poursuivre que « le gouverneur a ensuite donné l’ordre de nous emmener au poste de police. Le matin, le gouverneur a envoyé deux motos pour nous exhiber dans la ville afin de montrer que nous avions été arrêtés alors que ses partisans criaient : « il faut les tuer !” ». Hubert Djoko et Albert Lokongo ont indiqué avoir été battus lors de leur garde à vue. Ils ont été accusés d’incitation à la haine tribale et à la désobéissance civile avant d’être libérés le 22 août.

François Kendo, Responsable de la Radio Télé Losanganya

Human Rights Watch indique qu’un autre journaliste basé à Lodja, le Rédacteur en chef de la radio Télé Losanganya, François Lendo, a été lui aussi arrêté, le 16 septembre dernier et détenu pendant 11 jours pour des accusations d’« outrage au gouverneur ».

À Kinshasa, le 16 novembre, les services de renseignements ont arrêté la chanteuse populaire Elisabeth Tshala Muana, membre de longue date du parti politique de l’ancien président Joseph Kabila, et l’ont détenue pendant 24 heures après la sortie de son single « Ingratitude ». Elle a été accusée de viser Félix Tshisekedi, bien qu’aucun nom ne soit mentionné dans la chanson. Les autorités ont interdit la diffusion de sa chanson sur les ondes.

La répression au cours de l’année dernière contraste vivement avec la première année de mandat de Félix Tshisekedi, qui avait été marquée par une baisse significative de la répression politique par rapport à l’administration de Joseph Kabila, fait remarquer Human Rights Watch.

En 2019, Félix Tshisekedi avait libéré la plupart des prisonniers politiques et autorisé les congolais vivant en exil à revenir au pays. Cette année-là, les forces de sécurité ont néanmoins détenu arbitrairement et battu des manifestants pacifiques dans certains cas.

D’après Human Rights Watch, peu de responsables des forces de sécurité et du renseignement impliqués dans des violations des droits humains sous l’ancien président Joseph Kabila ont été traduits en justice, et beaucoup continuent d’occuper des postes à responsabilité.

Le ministre congolais des droits humains, André Lite, a expliqué à Human Rights Watch par téléphone qu’il « condamn[ait]», une fois de plus, ces violations des droits humains. « Lorsqu’un préposé de l’État, quel que soit son rang, se rend responsable de voie de fait, il doit être interpelé par la justice et poursuivi », a-t-il déclaré.

Kinshasa appelé à respecter les normes

Pour HRW, le gouvernement congolais a l’obligation en vertu du droit international des droits humains de respecter et de faire respecter les droits de toutes les personnes dans le pays à manifester pacifiquement et à recevoir et diffuser librement tout type d’information. Les partenaires régionaux et internationaux devraient demander instamment à la RD Congo de protéger les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. « Les autorités devraient mettre fin au harcèlement des journalistes et des médias, et abandonner toutes les charges retenues contre les personnes détenues pour avoir exercé leurs droits fondamentaux », déclare Human Rights Watch.

En 2020, la RD Congo figurait parmi les 30 pays au monde présentant le pire bilan en matière de violations de la liberté de la presse, d’après le Classement mondial de la liberté de la presse et malgré la promesse de Félix Tshisekedi de faire « véritablement » de médias « un quatrième pouvoir ».
« Le gouvernement devrait aussi abroger les dispositions pénales réprimant la diffamation et adopter des mesures concrètes pour protéger les journalistes conformément aux normes de droits humains régionales et internationales», conseille l’organisation.

HRW appelle le président Félix Tshisekedi à parler sans détour pour défendre les droits humains et prendre des mesures contre les gouverneurs de province qui cherchent à sanctionner les personnes critiques à l’égard de leurs politiques. Les agents des services de renseignements et autres personnels de sécurité devraient respecter les normes internationales relatives aux droits humains concernant l’arrestation, la détention et la procédure régulière.

Pour HRW , les tribunaux militaires ne devraient pas juger de civils. Lorsque des violations graves se produisent, les autorités devraient enquêter de manière rapide et impartiale et prendre les mesures disciplinaires ou légales appropriées à l’encontre des personnes responsables, quels que soient leur rang ou leur position. « Deux ans après l’arrivée de la nouvelle administration, la répression contre les libertés d’expression et de réunion pacifique s’intensifie », a conclu Thomas Fessy.

G.K.

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