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Processus de gestion des conflits de la communauté internationale au Mali: De la priorisation aux stratégies d’adaptation (Analyse scientifique)

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LE PROCESSUS DE GESTION DES CONFLITS DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE AU MALI : DE LA PRIORISATION AUX STRATEGIES D’ADAPTATION

Par Ouga Gnatto Ange Clément, Doctorant en Sciences Juridiques Économiques Sociales à l’Université Mohammed V Rabat Agdal Maroc

RESUME

La transformation du monde en monde moderne, la mondialisation, la trans-nationalisation et la décolonisation des peuples caractérisent depuis des décennies les bouleversements mondiaux. Le phénomène des conflits, la guerre et la paix sont au cœur des relations internationales. Depuis quelque temps déjà, le conflit armé qui perdure à ce jour fait des ravages dans le monde et en Afrique. Cependant, l’intervention de la communauté internationale pour mettre fin au conflit marque un pas vers la résolution et la paix. Ce rôle joué par la communauté internationale dans la prévention et la gestion des conflits est nécessaire pour mettre fin aux menaces graves à la sécurité intérieure d’une nation et, face à la recrudescence du terrorisme, à la sécurité régionale, voire à la reconnaissance internationale.

L’exemple du nord du Mali est dans une situation atypique, offrant un cas complexe difficile à décrypter, presque indissociable des autres cas dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Bien sûr, la crise au Mali cache une certaine particularité. Une récession caractérisée par des scandales politiques et financiers, la menace de l’islamisme, le printemps arabe de 2010 et l’instabilité sécuritaire à travers le pays. Cela a aggravé la situation. En conséquence, divers défis et problèmes de sécurité ont attiré la participation de toute la région et de la communauté internationale.

MOTS-CLES :

 Conflit, Afrique, Nord Mali, enjeux, géopolitique, résolutions, intervention, société internationale, sécurité, paix

SUMMARY

The transformation of the world into a modern world, globalisation, trans-nationalisation and decolonisation of peoples have characterised world upheavals for decades. The phenomenon of conflict, war and peace are at the heart of international relations. For some time now, the armed conflict that continues to this day has been wreaking havoc in the world and in Africa. However, the intervention of the international community to end the conflict marks a step towards resolution and peace. This role of the international community in conflict prevention and management is necessary to end serious threats to a nation’s internal security and, in the face of rising terrorism, to regional security and even international recognition.

The example of northern Mali is in an atypical situation, offering a complex case that is difficult to decipher, almost indistinguishable from other cases in this West African country. Of course, the crisis in Mali hides a certain particularity. A recession characterised by political and financial scandals, the threat of Islamism, the Arab Spring of 2010 and security instability across the country. This has aggravated the situation. As a result, various security challenges and issues have attracted the involvement of the entire region and the international community

KEYWORDS:

 Conflict, Africa, North Mali, issues, geopolitics, resolutions, intervention, international society, security, peace

INTRODUCTION

Le mouvement des peuples vers la décolonisation et la fin de la guerre froide ont marqué un tournant sombre et contradictoire pour tout le continent africain. Cela confirme l’affirmation d’Emmanuel Kant, qui disait : « L’état naturel des choses entre les unités politiques ressemble plus à un état de guerre : même si les hostilités n’éclatent pas, elles représentent toujours un danger. Ainsi, en raison des événements importants qui ont place dans l’histoire humaine, Au centre des événements, des guerres, des relations internationales, les questions sur la division du monde sont apparues En effet, s’il n’est pas facile de cerner la portée politique des évènements dont on est témoin, il est encore plus difficile d’en dégager la portée juridique. Ainsi, les changements auxquels nous avons assistés jour après jour se multipliaient. D’abord, la chute du Mur de Berlin ayant entraîné celle du Bloc socialiste est-européen dirigé et dominé par l’Union soviétique, puis celle de l’URSS, aboutissant à la signature de la fin de l’affrontement entre les pays du pacte de Varsovie et ceux de l’OTAN, la guerre a incessamment pris plusieurs formes inédites.

La mondialisation, les nouvelles technologies de l’information et de la communication ainsi que leur développement à travers le monde entier ont conduit à exacerber les guerres asymétriques, la guerre économique, le terrorisme international. Par ailleurs, la privatisation de l’usage de la force réservé à l’Etat, a rendu possible l’externalisation de plusieurs services de l’Etat.

 De ce fait, plus que jamais, se vérifie l’adage d’Héraclite « la guerre est la mère de toute chose » ; tant au centre des relations internationales tout comme la paix, mais plus que celle-ci, elle laisse sensible tous chercheurs.

Toutefois, le continent africain, en particulier la sous-région ouest-africaine a été le champ de plusieurs conflits armés de tout genre (génocide, purification ethnique, crise humanitaire, haines tribales, division sociales etc.). Un total de cinq guerres civiles, trente-huit coups d’État militaires réussis, ainsi que trois cas de rébellion ou de mouvements séparatistes entre autres tentatives de coups d’Etat dont le nombre reste incalculable.

Depuis la fin de la guerre froide, les pays africains ont connu une nouvelle tournure en matière de conflits armés, ils sont devenus continuellement de crises internes tendant à devenir les catalyseurs régionaux de conflits impliquant une multitude d’acteurs étatiques et non étatiques. Ainsi, cette mutation rend difficile la résolution efficace des conflits.

Par ailleurs, ces assertions sont d’autant plus vraies qu’aujourd’hui rien qu’en suivant l’actualité internationale : l’indépendance du sud-Soudan en juillet 2011 et le récent rattachement de la Crimée et Sébastopol à la République Fédérale de la Russie en mi-mars 2014, mais aussi l’actuel conflit dans le monde arabe qui suscite l’intérêt de toute la communauté internationale. Le cas de la République Centre Africaine a des similarités avec le conflit malien, et ils restent aussi difficiles à comprendre qu’à résoudre

C’est dans le même sillage que s’inscrit la crise malienne dans la mesure où elle prend racine aux ambitions et volontés du MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad), d’accéder à l’indépendance et par ricochet la partition du territoire malien entre le Sud-Mali et le Nord-Mali.

Les conflits en Afrique ont des spécificités communes dans leur processus de gestion externe. Certes, la crise malienne a ses propres particularités et réalités endogène-exogènes. Cependant la double crise sociopolitique et militaro-sécuritaire malienne nous offre une occasion inédite de réflexion sur « l’apport de la communauté internationale dans le conflit malien : du dégagement des priorités à l’adoption de stratégies appropriées ».

En effet, ancienne colonie française le Mali est un pays d’Afrique de l’Ouest devenue indépendant le 22 septembre 1960 après l’éclatement de la fédération du Mali regroupant le Sénégal et le Soudan français. Il a conservé les frontières héritées de la colonisation. Frontalier de sept pays d’Afrique de l’ouest, le Mali est le 7e plus grand pays d’Afrique avec une superficie de 1.241.238 km2. Selon une estimation de l’IDH en juillet 2013, il compte plus de 15 millions d’habitants; dont 2millions vivent dans la capitale (Bamako) située au sud du pays, zone abritant la majorité de la population. Le nord du pays représente 60°/° du territoire et rassemble environ 10°/° de la population dans les 3 régions du nord (Tombouctou, Gao et Kidal). Le Mali est une société très riche en histoire et en documentation culturelle ayant perpétué des récits en particulier sur les empires qui se sont succédés (Empire du Ghana, du Mali et du Songhaï), la majorité de la population malienne est musulmane et pratique l’islam. Les ressources vivrières proviennent du secteur agricole (céréales, coton, élevage) ; l’or, le pétrole ainsi que le gaz sont des potentialités et richesses avérées du pays.

Du point de vue institutionnel, le Mali est une république semi-présidentielle, fondée sur la constitution adoptée par référendum en 1992, fondant la 3e République malienne, un Etat démocratique et laïc. Il est membre de la CEDEAO, de l’UEMOA, de l’UA ainsi que de l’ONU etc. Il entretient également de nombreuses relations de coopérations avec plusieurs pays de la région. Lors de l’indépendance, la volonté du Mali était de construire un nouvel Etat avec les capacités d’un destin commun. Des années de l’indépendance à nos jours, le Mali a eu ses heures de gloire sur toute la scène internationale. La dramatique situation qu’il connait aujourd’hui est la résultante de nombreuses politiques publiques hasardeuses conduites depuis les premières années de son indépendance. En fait, le Mali, dès le lendemain de son indépendance a connu des cas de rébellions qui se répétèrent successivement en (1962- 1990-2006 et 2011), et trois coups d’Etat (1968-1991-et 2012) ainsi qu’une insurrection populaire en 1991.

La révolution du 26 mars 1991 et ses idéaux consacrés par la constitution de 1992 constituent les fondements de la 3e République. Cette constitution proclame l’inviolabilité de la personne humaine, et la souveraineté République.

 Les institutions mises en place étaient censées inscrire de façon irréversible le pays dans la démocratie, la stabilité et le développement. Asseoir un développement local pour approfondir la démocratie et un aménagement équilibré. Des réformes majeures avaient été mises en place dont la plus emblématique et ambitieuse était la décentralisation engagée à partir de 1999.

Le projet collectif pour un mieux vivre ensemble porté par la révolution de mars 1991 s’est rapidement transformé en projets de carrières personnelles au détriment de l’intérêt général, y compris de l’émergence d’une opinion publique. D’une manière explicite, les causes de l’effondrement de l’Etat malien sont essentiellement liées d’une part à la gestion consensuelle du pouvoir et à ses conséquences sur la perte de sens de l’action politique, ainsi qu’à la faillite du système de défense et de sécurité au cours de ces dernières années.

 Ce délitement des institutions, qui est allé de pair avec la dégradation de la situation sécuritaire au Nord du pays contribue à expliquer la débâcle de l’armée malienne dès les premières attaques perpétrées par le MNLA aidé par ANSER DINE début janvier 2012 au Nord-Mali. L’impréparation de l’armée malienne qui a révélé au grand jour la crise des institutions, a généré des mouvements sociaux et une grogne au sein de l’armée. Une situation instable qui, finalement aboutisse à plusieurs coups d’Etats militaires. Ces coups d’Etats militaires, n’ont fait qu’affaiblir l’Etat et accélérer l’occupation du Nord du pays par d’autres groupes armés se réclamant de l’islam radical ayant supplanté le MNLA dont : ANSER DINE (secte islamiste supplantée au Nord- Mali en janvier 2012), le MUJAO (Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest) et AQMI (Al-Qaïda au Maghreb Islamique).Dans l’optique de ne pas laisser sombrer le Mali la Communauté Internationale s’est engagée à apporter son aide à la population malienne d’où le dégagement des priorités à l’adoption des stratégies appropriées. Le premier chapitre sera consacré à l’intervention de la Communauté Internationale et dans un second chapitre parlé de l’implication des acteurs étatiques.

I- LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE : ENTRE MOBILISATION ET ACTIONS

Les conflits armés en Afrique (subsaharienne) constituent un défi important pour la communauté internationale. Ainsi, c’est conformément aux buts de l’ONU et des dispositions prévues par sa Charte sur le règlement pacifique des différends et menaces de paix,qu’interviennent les instances dans le processus de résolution d’un conflit armé.

La situation au Mali comporte cependant plusieurs crises qui se superposent. Celles‐ci sont notamment liées à la sanctuarisation des groupes terroristes dans la partie septentrionale du pays, au développement de l’économie criminelle, y compris le trafic de drogue et des prises d’otages, puis au conflit qui a éclaté dans le Nord en janvier 2012 et surtout à la crise institutionnelle née du coup d’Etat militaire du 22 mars 2012 à Bamako. Les crises simultanées qui affectent le Mali mettent à mal des principes fondamentaux de l’UA et de la communauté internationale toute entière. 

D’où les principes relatifs au respect de l’unité nationale, de l’intégrité territoriale des États membres; au rejet du terrorisme et de la criminalité transnationale organisée, ainsi qu’au respect des droits humains. Ces principes revêtent une importance vitale pour le maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité sur le continent ainsi que pour son développement. Toute tentative visant à les saper a de conséquences et, à ce titre, constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales. En outre, le recours à la rébellion armée et sa banalisation pour faire valoir des revendications politiques portent gravement atteinte au processus de démocratisation en cours sur le continent. Rappelons ainsi que d’après EMMANUEL KANT, ‘ la démocratie est favorable à la paix . En effet, depuis l’éclatement du conflit au Nord du Mali et de la crise institutionnelle qui s’en est suivie, des efforts soutenus ont été déployés, aux niveaux multidimensionnels en vue d’y trouver une solution durable.

 La mobilisation de la communauté internationale a été énorme. De stratégies harmonieuses pour la stabilisation de l’Etat malien ont été mises en avant dès le déclenchement du conflit. Nous chercherons donc d’élucider dans ce chapitre, le rôle des institutions internationales dans la résolution de la crise malienne. Comment ces organisations font face à une crise qui devient aussi complexe que longue dans la durée.

I.1- LES NATIONS UNIES ET L’UNION EUROPEENNE

Le rôle des Nations Unis et de l’UE dans la résolution des conflits armés, notamment en Afrique est prospère ; la MINUC en RDC, la MINURCAT, l’EUFOR RDC et l’EUFOR Tchad-RCA entre autres. Omniprésente dans la sous-région Ouest-Africaine depuis des années, l’Union Européenne, joue elle, un rôle important dans la résolution de la crise malienne, mais aussi dans la sécurisation de la zone sahélienne. C’est ainsi que sera évoqué succinctement le rôle que joue chacune des deux organisations universelle et Euro- continentale dans la résolution du conflit au Nord-Mali.

I.1.1- Les Nations Unies

Crée en 1945 suite à l’échec de la Société des Nations (SDN), l’Organisation des Nations Unies est crée afin d’arrêter les guerres entre les pays et de fournir une plate-forme de dialogue. L’implication de l’ONU dans la résolution de la crise malienne, consista à l’implication de quatre de ses organes à savoir : l’Assemblée Générale, le Conseil de Sécurité, le Secrétariat Général et la Cour International de Justice. Chacun de ses organes a contribué fortement à la résolution de la crise malienne selon les dispositions inscrites dans la charte de l’ONU.

Parmi les buts poursuivis par cette organisation, rappelons le maintien de la paix et de la sécurité internationale. La charte de l’ONU dispose dans son article 1er: « Maintenir la paix et la sécurité internationales et à cette fin : prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d’écarter les menaces à la paix et de réprimer tout acte d’agression ou autre rupture de la paix, et réaliser, par des moyens pacifiques, conformément aux principes de la justice et du droit international, l’ajustement ou le règlement de différends ou de situations, de caractère international, susceptibles de mener à une rupture de la paix».

De ce fait, les Nations avaient jadis mis en place un certain nombre de normes, de préventions, et de résolutions et/ou encore de règlements de différends pour la résolution des conflits. D’où son implication évidente dans la gestion de la crise malienne ; en ce sens qu’elle a atteint dès son éclatement une connotation internationale avec l’implication de la nébuleuse Al-Qaïda (réseau terroriste international).

En effet, l’Assemblée Générale et Conseil de Sécurité ont participé à la résolution du conflit malien, à travers : d’une part, la condamnation du putsch militaire du 22 mars 2012 ainsi que le rejet de la proclamation de l’indépendance de l’AZAWAD, proclamée par le MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad). Le Conseil de Sécurité de l’ONU a également réitéré sa profonde préoccupation quant à l’insécurité et la détérioration de la situation humanitaire au Nord-Mali et dans la région du Sahel après avoir adopté à l’unanimité quatre résolutions entrant dans le cadre de la gestion de la dite crise. Il s’agit de : la résolution 2056 du 5 juillet 2012 ; 2071 du 12 octobre 2012 ; 2085 du 20 décembre 2012 ; 21 00 du 25 avril 2013 et enfin la résolution 2164 adoptée en juillet 2014. Prenant en compte les enjeux du conflit, les risques de déstabilisation régionale et les conséquences multidimensionnelles, l’ONU a pris toute mesure permettant à l’Etat malien de renouer avec son intégrité territoriale et combattre les insécurités qu’il incombait. C’est ainsi qu’elle admettait le 27 septembre 2012 en Assemblée Générale, l’urgence de la situation au Mali. C’est dans le cadre de cette résolution qu’a été créée la (MISMA), la Mission Internationale de Soutien au Mali, d’où la première mission internationale de soutien qui devait être déployée au Mali, mais dont la précipitation d’une offensive inattendue des rebelles et djihadistes a déclenché l’engagement immédiat de la France et son déploiement par CEDEAO

I.1.2- L’UE au Mali et au Sahel

L’Union Européenne (UE) est un partenaire économique et politique unique entre 28 pays européens. Faisant ses premiers pas au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Son premier objectif était de renforcer la coopération économique, en partant du principe que les pays liés par des échanges commerciaux deviennent économiquement interdépendants et sont donc moins enclins à entrer en conflit. En effet, jusqu’en 2010, les missions civiles et/ou militaires de gestion des crises de l’UE, étaient essentiellement envoyées à des fins de stabilisation à posteriori, ou pour éviter la précipitation des crises.

C’est alors, que la posture de la France comme gendarme de l’UE pour l’Afrique est l’argument qui a motivé le soutien européen. Certains experts ont expliqué cette véracité dans la mesure où le rôle joué par la France s’avère un rôle de précurseur pour la stabilisation du Mali et la sécurité du Sahel face au risque terroriste. Cette action a permis de garantir la préservation des intérêts européens dans les dites zones. En parallèle de l’appui aux forces françaises dans l’intervention au Mali, l’Union Européenne signa avec l’Etat malien un accord bilatéral (EUTM-Mali) ou la (Mission de Formation de l’Union Européenne au Mali).

Cet accord vise cependant à contribuer à la formation des forces armées maliennes. S’inscrivant dans le cadre des résolutions de l’ONU et créée formellement le 17 janvier 2013 par le conseil des Affaires étrangères de l’UE, cette mission est composée de 550 personnes, dont 200 formateurs chargés de fournir des conseils en matière militaire. L’estimation officielle du coût de fonctionnement de l’EUTM Mali est de 12,3 millions d’euros pour les 15 premiers mois. La préservation des intérêts européens dus à la complexité de la zone sahélienne et des impacts d’insécurité dans des pays de l’euro ont fait du Sahel l’une des régions protégée et sous contrôle occidental. L’UE met en priorité les défis de sécurité du Sahel comme étant l’un  des défis les plus importants.

I.2- LE ROLE DES ORGANISATIONS REGIONALES

En plus des instances internationales, les organisations régionales jouent un rôle important dans la résolution des conflits qui les entourent. Les crises maliennes ont surtout retenu l’attention des pays voisins et de l’Afrique francophone. Au fil des semaines cependant, le Mali est devenu progressivement une question africaine concernant tout le continent. La Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest CEDEAO et l’Union Africaine l’UA ont été en tant que les deux premières institutions concernées, les premières à élaborer des stratégies de gestion avant toute implication internationale et/ou d’acteurs privilégiés. Les récents évènements survenus au Nord-Mali en mi-mai 2014 ne leur ont guère laissé indifférentes.

I.2.1- L’UA, un rôle d’appui et de coordination

Créée en 2002 à Durban en Afrique du Sud, en application de la déclaration de Syrte du 9 septembre 1999 , l’Union Africaine a remplacé l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA). Elle comprend en effet, 54 membres dont tous les pays d’Afrique à l’exception du Maroc qui s’est retiré de l’OUA en 1984 pour protester contre l’admission de la République arabe sahraoui démocratique en 1982 et du SOMALILLAND, qui ne sont reconnus par aucun État. Elle a comme vision, de « bâtir une Afrique intégrée, prospère et pacifique, dirigée par ses citoyens et constituant une force dynamique sur la scène mondiale». La nouvelle organisation panafricaine affiche dans son Traité constitutif des dispositions relatives aux questions de paix et de sécurité. La promotion de la paix, de la sécurité, du respect des principes et instituions démocratiques du continent, des droits de l’homme… figurent parmi les objectifs clés de l’UA.

Conformément aux dispositions renforcées de son article 4, l’Union Africaine peut intervenir dans un Etat membre en cas d’ « une menace grave de l’ordre légitime afin de restaurer la paix et la stabilité dans l’État membre de l’Union sur recommandation du Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA (44) ». C’est dans ce cadre, que l’Union Africaine intervient au Mali. Ainsi, lors de sa 323e réunion tenue à New York le 12 juin 2012, le conseil de paix et de sécurité de l’UA a autorisé la CEDEAO, en collaboration le cas échéant avec les pays du champ, à savoir l’Algérie, la Mauritanie et le Niger, de mettre en place des dispositifs sécuritaires et militaires requis, en vue de la réalisation des objectifs suivants :

Assurer la sécurité des institutions de la transition ;

Restructurer et réorganiser les forces maliennes de sécurité et de défense ;

Restaurer l’autorité de l’Etat sur la partie nord du pays et lutter contre les réseaux terroristes et criminels opérant dans la région. 

Ceci rappelle l’Organisation Commune des Régions du Sahel OCRS et ses objectifs. Bien que ne formant pas une organisation en tant que telle, le Mali et ses voisins sahéliens se sont reconnu le droit d’intervention permettant à chacun des quatre Etats (Mali, Mauritanie, Algérie et Niger) de poursuivre les terroristes sur le sol de son voisin.

L’UA a apporté tout son soutien à la médiation conduite par la CEDEAO dans la résolution de la crise malienne. Les deux organisations régionale et continentale ont travaillé en coalition sur le dossier malien afin d’apporter un rôle d’appui et de coordination dans ce processus de gestion externe. L’Union Africaine bien que n’ayant pas un rôle clé dans la gestion externe de ce conflit, a apporté une contribution importante. Elle apporta non seulement son soutien à l’organisation régionale qu’est la CEDEAO pour la progression des stratégies élaborées, mais aussi elle a été présente en tant qu’organisation continentale, à condamner les situations menaçantes de la paix dans un Etat membre. Egalement, dans le but d’apporter son soutien aux missions de paix, elle a alloué un montant de 50 millions de dollars.

I.2.2- La CEDEAO, principal médiateur de la crise

Créée par le traité de Lagos le 28 mai 1975, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) constitue avec ses 15 Etats membres (46), un cadre élargie de coopération économique. Dans sa vocation économique, Elle tend à libéraliser les échanges de produits industriels, la coopération en matière de développement industriel et l’instauration ultérieure d’une union douanière et d’une zone monétaire commune. Au-delà de sa vocation économique, la CEDEAO est dotée de compétences dans le domaine politique, notamment pour la prévention et le règlement des conflits concernant ses Etats membres.

Des lors, ses membres ont constitué une force de maintien de la paix (ECOMOG), qui est déjà intervenu pour le maintien de la paix et de la sécurité dans certains pays africains d’où (le Libéria, la Guinée Bissau et la Cote d’Ivoire).

Prenant cependant considération des dispositions de l’ONU sur le règlement pacifique des différends et des dispositions du protocole de la CEDEAO relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité,  l’intervention de la CEDEAO dans la crise malienne s’installa dans un cadre politique.

La  mission de la CEDEAO au Mali  avait pour rôle d’accomplir les tâches suivantes :

Aider à reconstituer la capacité des Forces de défense et de sécurité maliennes, en étroite coordination avec les autres partenaires internationaux participant au processus, y compris l’Union Européenne et d’autres États Membres;

Aider les autorités maliennes à reprendre les zones du nord de son territoire qui sont contrôlées par des groupes armés terroristes et extrémistes et à réduire la menace posée par des organisations terroristes, y compris AQMI, le MUJAO et les groupes extrémistes y affiliés, en prenant en même temps des mesures susceptibles de réduire les effets des opérations militaires sur la population civile ;

Passer progressivement à des activités de stabilisation afin d’aider les autorités maliennes à assurer la sécurité et à renforcer l’autorité de l’État au moyen de capacités appropriées ;

Aider les autorités maliennes à s’acquitter de leur responsabilité première, qui est de protéger la population ; en créant de bonnes conditions de sécurité pour l’acheminement de l’assistance humanitaire sous la direction de civils et le rapatriement librement consenti des déplacés et des réfugiés, agissant sur demande, dans les limites de ses capacités et en étroite coordination avec les acteurs du secteur humanitaire;

Protéger son personnel, ses installations, ses locaux, son matériel et sa mission et assurer la sécurité et les mouvements de son personnel etc.Les efforts entrepris par les organisations internationales pour résoudre le conflit  malien ont été très considérables certes, les acteurs étatiques jouent également un rôle important dans la gestion des conflits qui les entourent. De telles actions méritent d’être analysées et expliquées. L’apparition d’acteurs au sein d’un conflit peut présenter une phase aussi importante que complexe à déchiffrer. Cependant, la crise malienne présente une multitude d’acteurs en actions.

II -ACTEURS ETATIQUES, ENTRE MOTIVATIONS ET ACTIONS

L’intervention au Mali, comme toutes les interventions occidentales depuis la fin de la Guerre froide (de l’Irak jusqu’à la Libye en passant par l’ingérence syrienne depuis 2012) ne saurait être analysée de manière angélique, sous prétexte qu’elle serait une opération particulière certes, elle admet en effet ses propres déterminants.

Ayant adopté des mesures requises pour la sortie de crise de son pays, l’Etat malien se trouve aujourd’hui dans une période de post-crise aussi complexe qu’elle suscite plusieurs interrogations. Nombreux sont ces acteurs qui se sont impliqués dans la résolution de la crise malienne. Certains, d’acteurs clés concernés directement par la crise ; d’autres, dans la préservation de leurs intérêts. Les interventions liées aux motivations dans le dossier malien sont énormes. Les ressources naturelles constituent un réel outil de prolongation des conflits en Afrique, hors le Nord-Mali en possède énormément encore sous exploitées.

Pour comprendre les motivations de certaines actions entreprises dans la gestion externe de ce conflit, il convient d’évoquer des éléments importants, d’où les enjeux du conflit. Autant les États-Unis en effet, que la France, le Qatar et/ou l’Algérie… ont des visées pétrolières et gazières importantes dans les régions du Sahel. Chacun de ces États a intérêt à favoriser la situation géopolitique la plus à même de la placer en position de force dans les discussions relatives au partage des richesses. Le septentrion malien abritant de telles potentialités a suscité d’intérêts nouveaux.

II.1- LA FRANCE ET LE TCHAD, DES ACTEURS CLES

L’implication de la France et du Tchad, deux partenaires historiques de longues dates, apparait comme importante dans la gestion externe de ce conflit. Le Tchad possède une armée puissante et expérimentée en milieu désertique et l’intérêt de la France pour la zone sahélo- saharienne lié aux richesses de cet espace sont énormes et ce depuis la période coloniale. Cependant, quelles sont les zones d’ombre de cette intervention française ? Qu’en-est-il de l’implication tchadienne ?

I.1.1- La France, un acteur particulier

La France effectue un rôle primordial dans la gestion des conflits qui l’entourent. Ayant déjà intervenue dans plusieurs pays africains depuis la fin de la guerre froide, elle constitue un certain Etat gendarme de l’Europe en Afrique. Entre autre, la présence française en Afrique s’avère de l’évidence en : Côte d’ivoire, au Tchad, en RDC… Bien qu’omniprésente en Afrique notamment en Afrique de l’ouest, son rôle n’est guère sans motivations spécifiques. L’intervention de la France au Mali survient alors qu’officiellement la France est engagée dans un processus de désengagement militaire en Afrique. Le déclin des effectifs parait « irréversible », explique doctement le journaliste VINCENT HUGEUX.

Le même résume : « il fut un temps, pas si lointain, où les stratèges du dispositif militaire  Français en Afrique, revêt de ‘partir pour mieux rester. A la lumière des crises en cours, Centrafrique hier, malienne aujourd’hui, il s’agit plutôt de rester pour ne pas devoir revenir…». Cependant, quelles particularités jouent la France dans la gestion de cette crise ? Partant de celle-ci, quelles sont ses motivations?

Des lors, les troupes françaises engagent les combats contre les groupes armés qui avaient attaqué (Konna) afin d’empêcher leur descente vers le sud du pays.

La France a ainsi constaté que les groupes armés présents au Nord-Mali, envisageaient alors de prendre en otage le Mali tout entier constituant de facto une menace à l’existence même de l’Etat malien mais surtout à la sécurité et à la paix de toute la région ouest-africaine, par au-delà du Maghreb, de la France et de toute l’Europe. Le terrorisme touchant la sécurité internationale, la lutte contre le terrorisme est une lutte globale.

La France a ainsi constaté que les groupes armés présents au Nord-Mali, envisageaient alors de prendre en otage le Mali tout entier constituant de facto une menace à l’existence même de l’Etat malien mais surtout à la sécurité et à la paix de toute la région ouest-africaine, par au-delà du Maghreb, de la France et de toute l’Europe. Le terrorisme touchant la sécurité internationale, la lutte contre le terrorisme est une lutte globale.

D’une manière générale, ceci explique les stratégies à long terme que veut mettre en place la France dans plusieurs pays de la région mais aussi au Mali. D’où le processus de coopération militaire entamé dans plusieurs pays de la région à partir de janvier 2014. Toutefois, un accord de défense a été signé le 16 juillet 2014 entre le Gouvernement malien et le Gouvernement français établissant plusieurs dispositions dans le domaine de sécurité et de défense.

La sécurisation des matières premières au Nord-Mali, des intérêts géopolitiques, géoéconomiques, visant à assurer les intérêts géostratégiques dans la région sont essentiellement d’autres motivations françaises dans cette intervention. En effet, depuis la fin de la guerre froide, la France n’a cessé de reculer en Afrique à cause de sa vision géopolitique.

Cette position défensive de la France n’a fait que subir la montée de l’influence américaine dans toutes ses anciennes colonies d’un côté et d’autre coté, l’émergence du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) dont la plus grande manifestation a été l’accession depuis 2007 par la Chine au statut « du premier partenaire commercial du continent africain».

Ainsi, cet engagement militaire et onéreux au Mali a permis à la France de se repositionner géopolitiquement et d’apparaitre comme le seul rempart et allié des pays « fragiles » africains confrontés chacun de ses propres contradictions internes dont les manifestations ont été le soutien de la CEDEAO et de tous les pays africains (sauf Egypte et Tunisie) voire du monde à l’opération Serval.

Le 1er Aout 2014, l’opération Serval et l’opération Epervier (Tchad) ont conjointement été remplacée par l’opération Barkhane. Cette dernière a les mêmes objectifs et les mêmes buts, mais plus renforcée qu’elles, l’opération Barkhane vise notamment à lutter contre le terrorisme dans toute la région du Sahel. La reconfiguration de la géopolitique africaine en faveur de la France semble ainsi avoir un autre intérêt inavoué.

La principale critique avancée par les opposants à l’intervention française a été le fait que la réelle motivation d’une telle intervention était la défense des intérêts géoéconomiques de la France dans la région. Elle expliquerait largement les interventions françaises dans le continent africain notamment celle malienne dans la mesure où la carte d’implantation des terroristes au Sahel est presque parfaitement calquée sur celle des ressources pétrolières, gazières et énergétiques dans la région. Déjà omniprésente au Nord du Niger, la France prépare l’ouverture d’une nouvelle mine d’uranium à Imouraren, projet de mine à ciel ouvert qui, se situant entre le Sahel africain et le désert du Sahara, représente un investissement de plus d’un milliard d’euros. Cette mine se trouve cependant à quelques heures de piste de la frontière avec le Nord du Mali, ce qui pourrai expliquer le renforcement de son dispositif de sécurité dans la zone.

En 2013, l’attaque de mouvements armés sur le site gazier algérien d’In Amenas et les 38 otages qui y ont trouvés la mort, n’a fait que renforcer ce besoin de sécurité. Par la suite, des forces spéciales ont été affectées à la sécurisation de différents sites miniers d’Areva.

La sauvegarde des intérêts géopolitiques et géoéconomiques visant à assurer les intérêts géostratégiques de la France en Afrique s’inscrivent dans le contexte de la recherche de l’hégémon continental face à l’AFRICOM d’une part et le retour du BRICS d’autre part.

Contrairement au sous-sol du Nord-nigérien, celui du Nord-Mali était resté quasi inexploité. Mais à partir de l’an 2000 et l’accélération de la course aux matières premières, toute la zone du Sahel a été l’objet d’une évidente lutte d’influence entre les grandes puissances, Etats-Unis et Chine en particulier.

Les intérêts européens et encore plus français pour le Mali sont très vifs, même si les contraintes d’exploitation sont importantes (enclavement de la zone, sécurisation des transports).

I.2.1- L’implication Tchadienne

L’implication du Tchad dans la gestion de la crise au Nord-Mali a été initiée par la France. La faiblesse de l’armée malienne et celle des pays de la CEDEAO est l’argument qui a permis à la France de justifier son insistance à impliquer les forces armées du Tchad, pays qui n’est pas membre de cette organisation, dans les préparatifs d’une intervention au Mali. Cette implication a par ailleurs fortement contribué à repositionner le régime d’Idriss Deby, Président du Tchad, tristement célèbre pour ses violations répétées des droits humains. L’armée Tchadienne est composée de 30000 hommes, chose exceptionnelle dans la région et est puissamment armée. Mais surtout l’expérience de l’armée tchadienne en milieu désertique et dans l’affrontement de rebellions est sans précédent.

En outre, la France connait d’autant mieux les capacités des forces tchadiennes que l’armée Française est présente dans le pays sans discontinuer depuis l’indépendance du Tchad et elle dispose depuis 1986 d’un dispositif provisoire, l’opération Epervier et ses 950 hommes. Les mêmes forces tchadiennes ont été utilisées également comme forces supplétives sur d’autres terrains (RCA, Congo Zaïre, RDC).

Ainsi, le Tchad envoya ses premières troupes dès les premiers jours de l’opération Serval au Mali, avec l’appui logistique de la France, faisant monter son contingent jusqu’à un total de 2000 hommes. Ces troupes ont été rattachées dans un premier temps au dispositif militaire français et non à celui de la CEDEAO, ce qui a valu la qualification d’ « opérations franco-tchadiennes ». Cependant, le rattachement à la MISMA n’a été opéré que peu après le (11 mars 2013). Progressivement, 5 officiers tchadiens intégraient l’état-major de la MISMA.

Dès leurs arrivées sur le terrain, le professionnalisme et l’ardeur combattante de ces soldats ainsi que l’appui qu’ils pouvaient apporter à l’armée française a été mis aux premiers abords des commentaires. Leur engagement a été déterminant Dans le massif des ifoghas au Nord-Mali. Ils se sont par ailleurs distingués à travers leur présence active dans les zones de conflits du Nord-Mali, aux cotés des troupes françaises, notamment dans les zones « interdites » aux soldats maliens. Leur engagement dans les zones les plus risqués et le tribut en vies humaines payé le 22 février dans l’Adrar de Tighargâr (27 morts tués dans une embuscade) ont contribué à apporter un certain prestige à ces troupes auprès de l’opinion publique malienne et des médias africains.

Vers fin 2013, précisément au mois de septembre, des soldats tchadiens intervenant au Nord-Mali avaient quitté leurs contingents faute de non-paiement. De centaines de soldats ont quitté leurs postes, d’autres se sont mis à commettre d’actes atroces ; entre abus sexuel sur les femmes du Nord et pillage dans les domiciles notamment dans la région de Gao.

En outre, cet engagement tchadien au Mali n’est évidemment pas désintéressé. Il s’inscrit clairement dans une stratégie du président de retrouver une position plus enviable dans le cercle des Chefs d’Etats africains « amis de la France » où sa position ne cessait de se détériorer. En avril 2013, le président tchadien annonçait à la surprise générale son intention de retirer ses troupes du Mali après consultation de son Assemblée nationale sur fond de négociations avec l’ONU concernant la participation du Tchad à la future opération de maintien de la paix, notamment sur ses aspects financiers et sur le commandement de cette force.

Dès le lancement de la mission onusienne (MINUSMA), le Tchad y a participé avec l’engagement de deux milliers de soldats aux côtés d’autres troupes dont le Togo, le Niger, le Sénégal, le Nigéria etc.

II.2- ALGERIE ET MAROC : QUELLES ACTIONS STRATEGIQUES ?

La compétition entre le Maroc et l’Algérie pour assurer le leadership dans la région de l’Afrique de l’ouest et au Sahel, est évidente et ce pour des raisons assez différentes et concrètes. L’Algérie aussi bien que le Royaume chérifien apparaît tous deux comme des médiateurs dans la résolution du conflit malien. Ainsi, quelles stratégies emploient-ils ? Et quels sont leurs rôles dans le dossier malien ?

II.2.1- L’Algérie : un engagement stratégique

L’Algérie partage une histoire avec son voisin du sud (le Mali) ; il s’agit de l’histoire de la communauté touareg. Cependant son intérêt et ses relations avec ses voisins du sud, en particulier le Mali sont énormes. Depuis le début des rebellions au Nord Mali notamment en 1990, l’Algérie est intervenue pour résoudre la question touareg. 

Il s’est imposé comme médiateur en 1990 et 2006, ce qui a abouti à la signature des accords de paix de Tamanrasset signés en 1991 et les accords d’Alger, signés en 2006 où l’Algérie s’est encore officiellement imposé dans les médiations avec les rebellions touarègues, en concurrence pour la prééminence régionale avec la Lybie. Dans les récents évènements survenus au Nord-Mali, il revient comme un acteur stratégique.

Depuis l’apparition du terrorisme islamiste au Sahara algérien en 2003 exacerbé par les enlèvements et criminalités, l’Algérie en a fait l’un de ses défis majeurs, ce qui donna clairement une dimension internationale à ces islamistes algériens et procure une place toujours plus « stratégique » à l’Algérie dans le dispositif internationale de lutte contre le terrorisme. En raison surtout de son expérience de lutte contre l’islamisme depuis des années, le pouvoir algérien s’affiche désormais comme incontournable dans la région sur cette question. C’est ainsi qu’il s’allie aux côtés des Etats-Unis dans la « lutte globale contre le terrorisme » et s’arroge ainsi une véritable rente sécuritaire (armements et financements) auprès des occidentaux.

Aussi l’aide humanitaire et le soutien militaire que l’Algérie a apporté à l’État malien sont également à souligner. Egalement, elle a apporté un appui direct à l’Opération Serval pour surveiller les frontières, limiter les replis des groupes terroristes en ouvrant son espace aérien mais aussi son espace terrestre pour la tenue du dialogue inter-maliens. Ces négociations débutées en juillet 2014 ont évoluées et grâces à d’éminents efforts effectués par de hauts cadres et responsables politiques, mais surtout grâce à la compréhension et à l’implication de plusieurs acteurs.

Un accord de fin des hostilités a été signé entre les parties à la négociation, ce qui par ailleurs, prévoit une progression prospective dans les dites négociations afin d’aboutir à une paix durable pour le Mali et toute la région dans son ensemble. Depuis la reprise des pourparlers, difficile est de dire pour le moment l’issue certain de ce dialogue qui devient aussi complexe que profond entre le gouvernement malien et les groupes armés qui, eux ne cessent de se multiplier progressivement.

II.2.2- Le Maroc : un nouveau médiateur dans la crise malienne

L’arrivée et l’engagement du Maroc comme nouveau acteur, dans le dossier malien se présente comme coopératif et prometteur. Pays Ami de longue date, les deux Etats entretiennent de relations lointaines et profondes. Ainsi, dès les premiers évènements qu’a traversés le Mali, le Royaume Chérifien sous Sa Majesté le Roi Mohammed VI, est intervenu en y apportant tout son soutien spirituel, militaire, social et politique. En effet, la médiation marocaine a marqué des points dans la crise malienne à côté de celles du Burkina Faso et de l’Algérie.

En France le porte-parole du Quai d’Orsay, ROMAIN NADAL a dans une déclaration en février 2014 à Paris, apprécié la médiation que mène le Maroc dans la crise malienne. Le même porte-parole a déclaré que « c’est un processus très important pour que le Mali renoue avec la stabilité. Toutes les bonnes volontés sont bienvenues. Nous saluons à ce titre le rôle que le Roi du Maroc peut jouer pour faciliter la reconstruction et la réconciliation nationale au Mali. C’est un rôle très positif, constructif et important.

Cette crédibilité du Maroc renforce sa position non seulement vis-à-vis du Mali mais également le leadership marocain dans la région. Le Maroc est aujourd’hui considéré comme un acteur privilégié dans le dossier malien en particulier sur la question touareg. La visite du Roi Mohammed VI au Mali, lors de l’investiture du Président Ibrahim Boubacar Keita et sa dernière visite amicale en témoignent sa forte présence.

Le Nord Mali étant peuplé de Touaregs et d’Arabes, des populations très éloignées de Bamako, l’Etat malien espère une alliance modératrice avec le Maroc dans un rôle d’interlocuteur entre le Sud et le Nord afin d’aider à la réconciliation nationale du Mali. Ainsi, des membres du MNLA (mouvement national de libération de l’azawad) qui avaient demandé de l’aide auprès du souverain marocain pour son implication dans la résolution de la crise malienne, l’ont reçu.

 C’est alors, qu’avec l’accord de Bamako, le secrétaire général d’un groupe armé en l’occurrence le (MNLA) à travers leur chef Bilal Ag Cherif, a été reçu au palais royal de Marrakech par Mohammed VI, en janvier 2014.

 A l’issue de cette audience avec le chef rebelle, un communiqué du cabinet royal indiquait que « cette audience s’inscrit dans le cadre des efforts soutenus et permanents par Sa Majesté le Roi en vue d’instaurer durablement la paix et la stabilité dans ce pays frère et de contribuer à un règlement de la crise malienne ». Sa Majesté le Roi Mohammed VI avait réitéré « le souci constant du Royaume du Maroc de préserver l’unité territoriale et la stabilité de la République du Mali, ainsi que la nécessité de contribuer à une solution et à un compromis qui permettront de lutter contre les mouvements intégristes et terroristes menaçant aussi bien les pays du Maghreb que de la région Sahélo-Saharienne ».

D’où l’intérêt pour cet Etat-Nation et ceux d’Afrique en général. Cependant, la tournée qu’a effectué le Roi du Maroc en Afrique au premier trimestre 2014( Au Mali, en Côte d’Ivoire, et en Guinée Conakry) confirme le grand intérêt qu’accorde le Souverain marocain au développement et à l’enrichissement des relations de coopération avec l’Afrique dans plusieurs domaines et qu’elle s’inscrit dans le cadre de la stratégie de consolidation des liens de partenariat et de fraternité traditionnels avec les pays africains imprimée par le Roi du Maroc. Cette nouvelle tournée Royale en Afrique est porteuse de promesses pour un continent en plein essor.

Aussi, l’expérience du Maroc en matière de lutte contre l’extrémisme et le terrorisme s’avère évidente, mais aussi sur le plan spirituel son influence et son savoir-faire sont assez importants. Ce qui lui a permis de contribuer à la mise en place d’une carte religieuse au niveau international pour lutter efficacement contre l’extrémisme et les mouvements terroristes particulièrement dans la région sahélo-saharienne et de renforcer l’islam modéré dans le Continent  .

Au Mali, le Roi Mohammed VI s’est personnellement engagé dans la résolution de la crise d’un pays ami qu’est le Mali. Sa contribution a été importante sur divers plans. Les infrastructures socio médicales fournies pour aider les personnes démunies touchées par les inondations en septembre 2013 et celles touchées par la crise du Nord sont assez importantes. Les deux pays ont par la suite signé en 2013, un accord permettant la formation de quelques centaines d’imams au Maroc.

Soulignons que la doctrine de la Politique Etrangère du ‘Roi Mohammed VI’ est bien fondée sur la promotion de la paix spirituelle et économique dans les pays africains et la réalisation du développement durable pour faire face à la montée de l’extrémisme et la violence dans cette région.

 Une autre contribution du Maroc dans le dit domaine visait à la rénovation de dizaines de mosquées au Mali et dans d’autres pays de la région, d’où le Sénégal, la Guinée etc. L’implication du Maroc dans la crise sahélienne, notamment celle malienne apparait certes, comme une politique clé et à long terme. En dehors de sa participation à la résolution du conflit que connait le Mali, le Maroc s’érige désormais comme un nouveau partenaire économique du Mali. Les visites remarquées des deux chefs d’Etats ont contribué à renforcer les liens. C’est ainsi que lors d’un forum économique en mai 2014 que 17 accords de coopérations économiques ont été signés entre les deux Etats. Et le Maroc se présente désormais comme le 2e investisseur africain au Mali avec une présence renforcée dans les télécoms (Maroc Telecom) mais aussi à travers les banques (Attijariwafa Bank et la Banque Populaire). Les échanges commerciaux sont également à concrétiser!!. Ce cheminement d’accords de coopérations économiques et commerciales entre les deux pays expose une relation prometteuse et fructueuse.

CONCLUSION

L’aboutissement des efforts de la communauté internationale est une série d’efforts considérables qui sont devenus de plus en plus actifs et engagés dans la résolution du conflit au Mali. La crise actuelle au Mali apparaît comme un sujet international, attirant l’attention de toute la communauté internationale. Les mesures internes prises par le gouvernement du Mali pour résoudre la crise s’accompagnent de stratégies externes adoptées par les membres de la communauté internationale pour mettre fin au conflit au Mali depuis plus de deux ans. Ces efforts documentés ont permis au gouvernement malien de rétablir les normes constitutionnelles et d’organiser des élections transparentes, permettant par la suite aux agences gouvernementales de poursuivre les activités de l’État.

Des institutions africaines aux agences internationales, nous avons assisté à une action concertée sous les auspices des Nations Unies pour mobiliser la communauté internationale, militairement et financièrement, en faveur de la paix, de la sécurité et de la stabilité sur le territoire du Mali et de sa périphérie. Cette intervention a certainement été critiquée par de hauts responsables politiques et la population malienne. Par conséquent, l’intervention internationale est nécessaire pour résoudre cette crise et est appréciée par d’autres qui la considèrent certainement comme nécessaire. Le dialogue intra-Mali qui a débuté en juillet 2014 fait déjà avancer le processus de paix. Par ailleurs, le rôle joué par les acteurs étatiques constitue une autre étape.

La France en tant qu’ancienne colonie a mené une action unilatérale et un soutien considérable aux forces africaines dans le processus de gestion externe. Son intervention permis à l’Etat malien de ne pas sombrer dans le chaos que préparaient les groupes armés dans leur avancée vers le sud. Le rôle de la France s’est certes appréhendé d’une préservation de ses propres intérêts dans le Nord-Mali ainsi que dans la capitale où subsistent ses entreprises commerciales. 

Une telle position entrave le processus de pacification et de reconstruction entamée par l’Etat malien et le reste de la communauté internationale. D’autres acteurs africains, dont le Tchad, l’Algérie le Maroc ainsi que des puissances occidentales, apparaissent chacun comme un acteur actif dans la dimension externe de ce conflit. Précipitée dès les premiers mois de la crise, ces actions externes présentent en outre, des contours et des zones d’ombre qui doivent dûment être considérées avant une projection dans l’avenir.

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