Home Economie Privatisation du port de Matadi: plus de 10 mille agents de l’Ex-Onatra offerts en holocauste à Bolloré et MSC

Privatisation du port de Matadi: plus de 10 mille agents de l’Ex-Onatra offerts en holocauste à Bolloré et MSC

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Après les secteurs banquier et minier vendus respectivement aux kényans et aux chinois, le secteur du transport fluvial congolais est à son tour en train de basculer au groupe français Bolloré au travers ses partenaires de la société suisse MSC MEDITERRANEAN SHIPPING COMPANY S.A et de la société qatarie SHIPPING INVESTMENT GROUP LLC.

La convention dite de « concession pour l’aménagement, l’équipement et l’exploitation d’un terminal à conteneurs du port de Matadi », signée en avril 2022 entre la République démocratique du Congo et ces deux sociétés compromet à l’immédiat l’avenir de la Société commerciale des transports et des ports (SCTP SA) et de ses dizaines de milliers d’employés actifs et pensionnés rentiers.

Au-delà de tout, cet acte constitue une première privatisation d’une activité de l’ex-Onatra et risque de hanter le chef de l’Etat Félix Tshisekedi et sa descendance.

En perte de vitesse en Afrique de l’Ouest où il exploite de nombreux ports et chemins de fer, le groupe français Bolloré a anticipé la perte de la confiance des populations et dirigeants de la région envers la France.

En phase de reconversion vers d’autres activités, il s’est caché derrière son partenaire suisse MSC MEDITERRANEAN SHIPPING COMPANY SA pour s’adjuger à vil prix le port de Matadi, en échange de 140 millions USD de bail et un peu plus de 6 millions USD d’aménagement.

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Aux termes de la convention de concession précitée, la RDC, piquée on ne sait pas quelle mouche, a consenti volontairement à un désastre social, en acceptant le licenciement de plus de 10.000 agents actifs et plus de 13.000 retraités rentiers de la SCTP car, le licenciement des salariés est envisagé et seul l’ex-Onatra en assurera le coût, l’acquéreur du port de Matadi n’ayant aucune obligation de conserver ce personnel.

Ce, d’autant plus que le port de Matadi procure à lui seul plus de 85% des revenus à la Société commerciale des transports et des ports.

De plus de 5 millions USD à 388 000 USD de recettes le mois

Le procès-verbal de satisfaction des conditions préalables et d’entrée en vigueur signé par le gouvernement congolais représenté par la ministre d’Etat, ministre du Portefeuille, Adèle Kayinda Mahina, le ministre des Transports, voies de communication et de désenclavement ai, Marc Ekila Likombio, et le ministre des Finances, Nicolas Kazadi et le concessionnaire représenté par David El-Bez, le 15 mars 2023, en présence du directeur général ai de la SCTP, Martin Lukusa Cibangu Panu, renseigne que les Parties sont satisfaites des conditionnalités fixées dans le contrat de concession signé le 25 avril 2022.

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Parmi ces conditionnalités, figurent entre autres, la durée de la convention fixée à 30 ans par l’article 8.3 du contrat de concession vérifié par alternance.cd ; le rachat par le concessionnaire des biens de la SCTP ; le droit d’accès direct fluvial et terrestre, y compris routier et ferroviaire au périmètre concédé ; un régime fiscal et douanier spécial pour le concessionnaire etc.

En ce qui concerne les finances, le concessionnaire a consenti à investir dans un premier temps, 6 millions USD dans l’aménagement et l’équipement du port de Matadi et à verser tout au long de la durée de la concession, la somme de 140 millions USD au profit de la SCTP.

Un expert du Conseil supérieur du portefeuille(CSP) interrogé par votre média en ligne s’est dit scandalisé et considère que cette somme ne représente rien par rapport à l’exploitation du port de Matadi à l’état actuel. «  Si on prend 30 ans fois douze mois on a 360 mois. Et si on divise 140 millions USD par 360, on aura de 388 888 USD par mois », a-t-il calculé.

Preuve à l’appui, il a affirmé que « malgré la vétusté de ses équipements, l’ex-Onatra fait encaissements d’au moins cinq millions USD par mois au port de Matadi ».

De l’avis de cet expert, en cédant le port de Matadi à Bolloré et à ses partenaires, le gouvernement congolais a volontairement fait le choix de perdre chaque mois au moins 4 961 112 USD (quatre millions neuf cent soixante et un mille, cent et douze dollars américains).

La SCPT peut réhabiliter seule le port de Matadi

Un autre expert approché par alternance.cd dit lui aussi ne pas trouver de raisons valables qui ont pu convaincre le gouvernement à privatiser le port de Matadi.

Pour avoir participé à des études économiques commandées par la Banque mondiale sur la rentabilité des entreprises publiques de la RDC, il soutient que l’ex-Onatra est capable de réhabiliter et moderniser le port de Matadi sans aucun apport extérieur.

« Le problème qui se pose dans cette entreprise, argue-t-il, est managérial et non financier et relève en grande partie de la responsabilité du gouvernement ».

Il rappelle que la redevance logistique terrestre (RLT), instituée par arrêté interministériel sur tous les conteneurs à l’import et export depuis 2012 à l’initiative de l’ancien premier ministre Matata Ponyo, avait pour principal objectif la réhabilitation des chemins de fer et des infrastructures portuaires de l’Ex-Onatra.

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« De 2012 à 2015, révèle avec amertume un cadre du ministère des Finances, on était déjà à 40 millions USD mais ces fonds ont été dilapidés ».

La même source revient à la charge pour indiquer qu’en octobre 2021, le gouvernement avait autorisé la SCTP d’affecter à autre chose plus de 12 millions USD de la RLT.

D’un exemple à un autre, on relève que la société a réhabilité, en 2013, 2 Quais, sur fonds propres et en régie (avec ses services internes) pour 5 millions USD alors que la Banque mondiale tablait sur 40 millions USD.

Pari risqué pour Félix Tshisekedi

Le même gouvernement qui a offert le port de Matadi à MSC doit une créance certifiée de 207 millions USD à la SCTP.

A ce sujet, un haut cadre de l’Administration centrale du ministère des Transports a soufflé aux enquêteurs d’alternance.cd que « l’ancien premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba avait autorisé l’Ex-Onatra à négocier une créance de cette somme avec une banque et la Rawbank était disposée à lui offrir cette créance, mais que les clivages politiques ont tout bloqué ».

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Du point de vue historique, le port de Matadi devient la première propriété et activité de la SCTP à être cédée à une entreprise étrangère, en 88 ans de fonctionnement de cette entreprise dans sa configuration actuelle avec notamment une présence dans 17 provinces, 3 ports maritimes (Banana, Boma et Matadi) ; plusieurs ports fluviaux ; et trois activités principales (exploitation des services de transport multimodal, exploitation du chemin de fer et la gestion du transport fluvial et chantiers navals.

Bien plus, l’histoire retiendra que c’est sous le régime de Félix Tshisekedi que l’entreprise publique qui emploi le plus de congolais aura vu sa principale source des revenus être carrément vendue à une société étrangère, alors qu’elle est en mesure de se moderniser.« S’il ne prend garde, la privation du port de Matadi risque de lui coller à la peau comme le contrat chinois colle à celle de son prédécesseur Joseph Kabila », prévient un député national de l’Union sacrée.

Pour preuves, un tableau récapitulatif du chiffre d’affaires de la SCTP, tombé sur la table des auteurs de cette enquête démontre noir sur blanc que le port de Matadi a réalisé de 2012 à 2019, les recettes cumulées de 938 422 422 USD (neuf cent trente et huit millions, quatre cent vingt-deux mille quatre cent vingt-deux dollars américains).

Commentaire d’un analyste financier: « malgré l’impact des ports privés construits à partir de 2016 dans le Kongo central et la chute du chiffre d’affaires mensuel qu’ils ont entrainée, la SCTP est en mesure de réhabiliter ce port et continuer à prendre en charge les charges du personnel et autres dépenses dont les arriérés des salaires ».

Le prochain volet de cette enquête traitera du contours des négociations pour la conclusion du contrat de concession pour l’aménagement, l’équipement et l’exploitation du port de Matadi et de contradictions entre cette concession et le projet du port en eau profonde de Banana, impliquant un investissement de 1 milliard USD.

Robert DJANYA

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