Le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, a été reçu avec les honneurs militaires de la part du gouverneur militaire du Nord-Kivu, à son arrivée à Goma, ce mardi 5 novembre 2024, pour participer au mécanisme de vérification ad hoc renforcé (MVA-R). Quelques heures plus tard et à de milliers de kilomètres de là, le représentant de son pays au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, à Genève, a eu des vives escarmouches verbales avec le porte-parole du gouvernement congolais, Patrick Muyaya, lors de la séance de présentation par la RDC, de son rapport national dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU). Ça fait débat dans l’opinion nationale congolaise.
C’est un chef de la diplomatie rwandaise aux anges qui a reçu les honneurs militaires à Goma ce mardi. L’image d’Olivier Nduhungirehe riant jusqu’aux éclats au moment d’ordonner au gouverneur militaire du Nord-Kivu, au garde à vous, de baisser le salut, frappe les esprits et sera gravée pour longtemps dans les mémoires des congolais. Une image à de lumières de kilomètres à l’opposée des déclarations intempestives des officiels congolais, qui crient partout pour dénoncer l’agression rwandaise.
Certes, le mécanisme de vérification ad-hoc renforcé relancé à Goma, sous la médiation angolais, intégrant des officiers de liaison congolais et rwandais est important en ce sens qu’il marque une énième tentative de surveillance conjointe de la situation sécuritaire dans l’est de la République démocratique du Congo. Ce dispositif intervient à la suite de la réunion des experts des organes de défense et de sécurité tenue à Luanda, capitale angolaise, le 31 octobre dernier. L’objectif visé est l’opérationnalisation du Plan harmonisé de neutralisation des FDLR et le désengagement des forces rwandaises du territoire congolais.
Contradiction ou changement de ligne diplomatique ?
Fallait-il alors dérouler le tapis rouge (au sens symbolique) au ministre rwandais des Affaires étrangères ? Olivier Nduhungirehe ne pouvait-il être sobrement accueilli à Goma, ne serait que pour respecter la ligne diplomatique imprimée jusque-là par Kinshasa? Et pourquoi a-t-on laissé la délégation congolaise à Genève tirer sur le Rwanda, en lui imputant des violations des droits de l’homme perpétrées sur les zones sous contrôles de ses supplétifs du M23?
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Pour ceux qui ne l’ont pas appris, il faut signaler qu’à Genève, le porte-parole du gouvernement congolais a déclaré notamment que « nous ne saurions pas, au vu de toutes les déclarations qui ont été dites ici, présenter les faits en déterminer les causes et les origines».
Patrick Muyaya a accusé le Rwanda de soutenir le M23, en indexant Kigali notamment de recrutement d’enfants soldats et de leur utilisation dans les combats.
Dans la foulée, le ministre de la Communication et médias de la RDC a rappelé que le gouvernement américain avait sanctionné le Rwanda en septembre 2013 pour l’utilisation d’enfants soldats dans des milices opérant sur le territoire congolais.
Ce en quoi le représentant du Rwanda a rétorqué, en arguant que « cet examen porte sur la RDC et non sur le Rwanda ». Il a, ensuite, demandé « à l’orateur de s’abstenir de faire entrer le Rwanda aux question de droits de l’homme en RDC ».
Le ton était tellement monté entre les délégations de Kinshasa et de Kigali au point d’obliger le président de la séance a réagir pour inviter « tous les orateurs à exprimer leurs déclarations de manière respectueuse et à éviter les questions bilatérales ou territoriales.»
A Goma par contre, le ton était à l’apaisement, mieux à l’amitié entre deux pays voisins, condamnés à vivre dans la paix.
Jean Pérou Kabouira
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