Home Société Pretendue chasse aux swahiliphones à Kinshasa: gros mensonge (grand reportage)

Pretendue chasse aux swahiliphones à Kinshasa: gros mensonge (grand reportage)

9 min read
0
0

Depuis mardi 18 février 2025, des messages faisant état de l’agression à Kinshasa, de ressortissants de l’est sur base des accusations de complicité avec le M23 sont publiés sur les réseaux sociaux. Les auteurs de ces messages prétendent que les victimes sont choisies sur base de la langue swahili et que certaines d’entre elles risquent la justice populaire. Nos reporters ont sillonné tous les districts de Kinshasa, interrogé plusieurs habitants et quelques bourgmestres. De cette muni enquête, il s’avère qu’il n’y a pas d’attaques ciblées dans la capitale congolaise contre les personnes qui parlent le swahili. Reportage.

Il est 15 h 20 de ce mardi, au marché central, précisément au croisement des avenues Itaga et Kasa-vubu, nouvellement réhabilitée. Une jeep grise de marque TX stationne juste devant une vingtaine de taximans motos, majoritairement originaires du Grand Kasaï. La trentaine révolue, le conducteur n’est visiblement pas habitué des lieux et descent de sa bolide pour demander des renseignements auprès d’une vendeuse. Alors qu’il échange avec une dame, son téléphone sonne. Il décroche et échange en Swahili pendant près de deux minutes avec son correspondant.

Les taximans motos qui pourtant le pressent (les wewa ont la réputation d’être pressés) de dégager la route ne se sont pas du tout interressés à sa langue. L’un d’entre eux lui demande gentiment de garer à côté afin de leur laisser un passage. Il s’exécute. Fin de la discussion dans une bonne ambiance.

A près de trois kilomètres de là, le rond point des Huileries grillonne de toutes sortes de bruits. A l’arrêt de taxis bus de Lemba, six taximans originaires de diverses régions du pays commentent en Lingala l’actualité sécuritaire. L’un se plaint des difficultés qu’il éprouve depuis que six membres de sa famille qui ont fui la guerre à Goma sont hébergés chez lui à Matete. Ses collègues sont pris de compassion et promettent de cotiser chaque semaine quelque chose pour soutenir ces déplacés, tous swahiliphones.

Lire aussi 
Lingala ou Otetela comme première langue d’apprentissage au Sankuru : Voici la vérité!

A Limete 14 ème rue Poids lourds, J. Amisi, agent de l’État, raconte à un voisin le calvaire qu’a vécu sa sœur à Bukavu lors de l’entrée du M23 appuyé par le Rwanda. Un autre voisin, originaire du Sankuru (Grand Kasaï) qui suit leur discution sans y être invité, propose que cette sœur, qui est arrivée à Kinshasa la semaine dernière en provenance de l’Ouganda, soit hébergée gratuitement avec son mari et leurs deux enfants dans sa parcelle située au quartier Mikonga 2, Camp PM, dans la commune de la N’sele. Ils prennent rapidement de dispositions pratiques et dans les heures qui ont suivi, sa promesse a été concrétisée, à zéro franc.

La gentillesse de la population de Tshangu

Au marché de la Liberté, situé dans la commune de Masina, district de la Tshangu, qui a la réputation d’avoir été le mouroir pour les militaires rwandais lors de la deuxième guerre du Congo-ce marché avait été construit par le gouvernement pour récompenser l’héroïsme de la population de l’est de Kinshasa-on entend toutes les langues, y compris le swahili, se parler sans aucun problème.

Une détentrice d’un restaurant de fortune
dénommé « Malewa maman Muswahili» n’a jamais été inquiétée pour sa langue.

Notre reporter a même dîné dans ce restaurant ce mardi. Il a été particulièrement marqué par la gentillesse des clients et surtout de la propriétaire, qui témoigne-t-on, a décidé d’engager au moins six jeunes femmes ayant fui la guerre, qui voudraient travailler avec elle. Une initiative soutenue par deux commerçants du coin, qui ont promis de l’appuyer en denrées alimentaires.

Lire également 
Prise de Bukavu par l’AFC/M23: la Croix-Rouge annonce la découverte d’une vingtaine de corps

A de dizaines de kilomètres de là, deux familles habitant UPN ont accepté de transformer gratuitement les dépôts de leurs maisons en chambres d’accueil pour des personnes qui ont fui la guerre à Goma.

Pourtant, les propriétaires des dites maisons ne sont pas originaires du Grand Kivu. Ils sont tous du Kongo Central.

Ces quelques témoignages triés parmi les centaines recueillis font démentir les auteurs des messages prétendant que les swahiliphones seraient malmenés et maltraités à Kinshasa.

Selon un spécialiste en fact-cheking contacté, les personnes qui ont lancé cette alerte sur les réseaux sociaux sont majoritairement réputées acquises à la propagande rwandaise. En témoignent quelques captures ci-dessous.

A.Kanyama, P. Halele et J. Lomanga

Dans la même catégorie 
«La guerre de l’est ne doit en aucun cas être celle d’un groupe d’hommes» (Me Claude Kabi Batasema)
Load More Related Articles
Load More By Admin
Load More In Société

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Check Also

RDC: début de l’évacuation à Kinshasa des militaires et policiers protégés par la Monusco à Goma

Après plus de trois mois passés à la base de la Mission des Nations unies pour la stabilis…