
Le 20 mai 2025, Augustin Matata Ponyo, député national, a été condamné par la Cour constitutionnelle à 10 ans de travaux forcés, 5 ans d’inéligibilité et à la confiscation de ses biens.Un verdict tonitruant, une décision aux répercussions institutionnelles majeures…Et pourtant, du côté de la représentation nationale, rien.
Ce que l’on disait en préparation depuis longtemps s’est concrétisé. L’affaire Bukanga Lonzo, dénoncée depuis le début par l’ancien premier ministre Matata Ponyo comme un procès politique a rendu son verdict. Ce dernier a écopé de 10 ans de travaux forcés, 5 ans d’inéligibilité et la confiscation de ses avoirs. Ses coaccusés, Deogratias Mutombo et Christo Grobler ont écopé chacun de cinq ans de travaux forcés.
L’Assemblée nationale, qui a pourtant haussé le ton ces derniers jours contre ces poursuites sans que la Cour constitutionnelle ait sollicité d’elle la levée des immunités du député national Matata brille par un silence inquiétant. Pas de déclaration. Pas de motion. Un silence. Un vide. Un malaise.
Une Cour qui condamne… un député encore protégé
Matata n’est pas un citoyen ordinaire.
Il est député national en exercice.
Et selon la Constitution, il ne peut être poursuivi sans autorisation de l’Assemblée nationale.
Mais cette autorisation n’a jamais été donnée. Et pourtant, la Cour a prononcé sa sentence, comme si l’Assemblée ne comptait plus. Et l’Assemblée ? Elle regarde ailleurs.
Jusqu’ici, aucune réaction officielle n’a été exprimée. Ni le président de la chambre, ni un groupe parlementaire, ni la plénière n’ont pris position.
Face à ce qui s’apparente à une violation frontale de l’équilibre des pouvoirs,
la chambre basse du parlement semble figée, paralysée, voire résignée.
“On dirait un navire parlementaire qui prend l’eau mais refuse de lancer l’alerte”, ironise un député de la majorité.
Un silence qui fait du bruit
Des analystes estiment que ce silence n’est pas neutre. Il envoie un signal dangereux : que l’Assemblée accepte d’être contournée. Qu’un député peut être condamné sans son aval, avec ses immunités parlementaires. Que le principe de séparation des pouvoirs est négociable. Et ce message est destructeur.
« Car si la chambre basse ne défend pas ses membres, alors elle ne défend plus sa fonction« , regrette un député national.
Il pense qu’à force de ne pas parler, on devient complice.
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L’histoire jugera les décisions de la Cour.
Mais elle jugera aussi les non-décisions de l’Assemblée.
“Le silence, dans ce cas, ce n’est pas la prudence. C’est l’abandon. C’est une abdication politique”, tace un député national élu de Kinshasa.
L’Assemblée nationale n’a pas seulement le droit de réagir. Elle a le devoir de protéger la Constitution qu’elle incarne.
Pami Halele