
Inculpé pour détournement présumé de 19 millions de dollars destinés à la construction d’une prison à Kisangani, le ministre de la Justice et garde des sceaux, Constant Mutamba, refuse d’être jugé par le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde. Alors que ce dernier a sollicité l’autorisation de l’Assemblée nationale pour le poursuivre, il l’a récusé, lui et les magistrats sous son autorité directe.
Dans une correspondance lui adressée ce mardi 10 juin 2025, le ministre d’État, ministre de la Justice et garde des sceaux explique au procureur général près la Cour de cassation que sa démarche est sous-tendue par l’article 59 de la loi n°13/011 B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire.
Il justifie son choix par l’animosité qui caractérise leurs rapports.
« Votre intérêt personnel dans cette affaire ainsi que l’animosité créée entre vous et moi suite à ma lutte contre les antivaleurs dans la justice, justifient la présente récusation et celle des magistrats sous votre autorité pour partialité, règlement des comptes politiques et conflit direct avec le ministre d’Etat », a écrit Constant Mutamba à Firmin Mvonde.
Il rejette les allégations de « l’intention de détournement », rappelant qu’il a sollicité l’approbation de la première ministre, «qui avait toute latitude pour valider ou rejeter le projet ».
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Le ministre de la Justice nie tout détournement, affirmant que les fonds sont encore bloqués par le CENAREF.
« A ce jour, relève le ministre de la Justice, les deniers publics non utilisés, tel qu’ attesté par le blocage opéré par le CENAREF, ne peuvent sous-tendre un détournement ».
Il rejette l’accusation du PG près la Cour de cassation selon laquelle, le site de construction de la prison pour laquelle 19 millions USD ont été versés sur le compte de la société Zion construction Sarl et affirme que celle-ci a prouvé les preuves de son existence auprès du CENAREF.
Constant Mutamba accuse Firmin Mvonde de chercher sa tête pour échapper à des enquêtes notamment son acquisition d’un bien immobilier de grande valeur à Bruxelles et sur la gestion des fonds alloués au fonctionnement des parquets.
« Convaincu qu’il s’agit d’un acharnement et d’un complot pour en finir avec un adversaire ombrageux, je me sens en droit d’empêcher votre partialité et celle des magistrats de votre office afin de bénéficier d’une instruction juste et non intéressée par les magistrats d’un autre parquet et ce, pour éviter une justice instrument du règlement des comptes politiques« , conclut le ministre d’État, ministre de la Justice et garde des sceaux.
Dans ce dossier, Constant Mutamba est visiblement mal barré. Après l’avoir auditionné à deux reprises, le parquet général près la Cour de cassation, qui avait obtenu l’autorisation d’instruire cette affaire, est rentré à l’Assemblée nationale pour solliciter l’autorisation, cette fois-ci, de le juger pour détournement.
Si cette autorisation n’est pas obtenue d’ici le 15 juin 2025, elle pourrait être accordée ou non par le bureau de l’Assemblée pendant la période de vacances parlementaires.
Anny Kanyama