Quatre ans après sa mort, le combat de toute une vie d’Étienne Tshisekedi résonne toujours dans la mémoire collective congolaise. Les espoirs de la concrétisation de sa longue lutte pour l’instauration d’un État de droit en RDC sont sacrifiés sur l’autel de la recherche de la satisfaction des intérêts personnels d’une minorité au détriment de la majorité.
A ce jour, il est devenu difficile de dire si le fils du Sphinx, Félix Tshisekedi rend la bonne copie de l’État de droit tel que le prônait son père. Quelques faits.
Le respect des normes et des lois constitue le socle de l’État de droit. Dans ce cadre, les compétences de chaque institution et de ses animateurs sont clairement définies et les normes qu’elles édictent doivent être respectées par tous.
En République Démocratique du Congo, la lutte pour la conservation du pouvoir semble avoir détourné le Chef de l’État Félix Tshisekedi de cet objectif. Élu sur base du slogan « le peuple d’abord », il n’hésite pas à évoquer le concept de l’État de droit dans ses prises de parole publiques. Et dans la pratique?
Que d’espoirs déçus !
Son arrivée au pouvoir était considérée comme l’aboutissement du combat de son père. Deux ans et demi plus tard, les avis sont partagés sur le bilan de Félix Tshisekedi.
Dans le domaine des droits humains par exemple, des organisations spécialisées fustigent l’augmentation d’atteintes. C’est le cas de l’Ong Journalistes en Danger (JED), qui a recensé 116 cas d’atteintes à la liberté de la presse en 2020, soit une augmentation de 36,4% par rapport à l’année précédente. Selon ce rapport qui a fait beaucoup de bruits, les services de sécurité sont responsables de 30, 17% de cas de violations de droit de la presse en 2020.
Au premier trimestre de l’année 2021, la courbe de violations des droits et libertés fondamentales en lien avec l’espace démocratique ont connu une augmentation de 30% par rapport à celles documentées en janvier 2020 d’après un rapport du Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’Homme (BCNUDH) publié fin mars dernier.
Chasse à la sorcière
Au plan politique aussi, il y a des signes inquiétants. En effet, depuis quelque temps, on assiste à une sorte de chasse à l’homme sous différentes formes, contre des leaders que l’on considère comme des potentiels adversaires du Chef de l’Etat en 2023.
Les premiers visés sont sans doute Moïse Katumbi et Matata Ponyo. Si le premier n’est pas encore directement inquiété, une proposition portée par Noël Tshiani visant à réserver la course à la magistrature suprême aux seuls congolais nés d’un père et d’une mère congolaise le viserait personnellement. Il suffit d’observer l’acharnement de ses communicateurs sur l’ancien fonctionnaire de la Banque Mondiale pour s’en rendre compte.
Quant à l’ancien Premier ministre, le rapport de l’Inspection Générale des Finances(IGF) sur le projet du parque agro-industriel de Bukanga Lonzo dont il conteste la véracité est exploité dans tous les sens, visiblement dans le but de le nuire.
A cet effet, des gros moyens sont déployés pour réduire au silence celui qui ne cesse de vanter le bilan économique de son gouvernement, marqué notamment par la stabilité du cadre macro économique et des retombées sur tous les secteurs de la vie nationale.
Ainsi, alors qu’il est censé mener des investigations dans la discrétion et faire rapport à qui de droit, comme l’a récemment expliqué Maitre Willy Wenga dans une radio de la place, l’Inspecteur Général des Finances, le chef de service Jules Alingete livre les personnes qui font l’objet de ses investigations aux tribunaux des réseaux sociaux.
Du coup, il suffit d’être cité dans un rapport de l’IGF pour être considéré d’office comme coupable. Regrettable!
Pourtant, au sommet de l’ensemble pyramidal de l’Etat de droit figure la Constitution, suivie des engagements internationaux, de la loi puis des règlements. A la base de la pyramide figurent les décisions administratives et les conventions entre personnes de droit privé.
Seul Dieu peut savoir s’il était encore vivant et qu’il observait la gestion actuelle du pays, comment Étienne Tshisekedi allait traiter son fils. Si tout était à refaire!
Jean Pérou Kabouira