Et si la médiocrité que l’on déplore dans la corporation des journalistes congolais trouvait son explication dans la détérioration de la qualité de l’enseignement à l’Institut Facultaire des Sciences de l’Information et de la Communication (IFASIC) ? Le célèbre institut d’enseignement supérieur qui a formé la plupart des grands noms de la presse de la RDC s’enfonce dans les antivaleurs. Une enquête menée dans l’ex ISTI par ALTERNANCE.CD révèle de pratiques immorales dont la corruption, sous- évaluation des effectifs des étudiants, clientélisme et le favoritisme auxquelles se livrerait le comité de gestion actuel. Voici le premier de trois volets de notre enquête.
Sauf changement de dernière minute, le Comité de gestion de l’IFASIC et les Professeurs vont se rencontrer le mercredi 3 mars 2021. Selon nos informations, ces derniers projetteraient de faire part au Recteur, Prof Rigobert Munkeni, de leur mécontentement, suite à la nomination en cascade des assistants et surtout à l’attribution de cours à des docteurs ayant récemment défendu leurs thèses dans d’autres universités. Est particulièrement dans leur viseur, le Docteur Martin Ziakwau, qui se serait vu octroyé le cours d’ « histoire des civilisations du monde contemporain » en G1, moins d’un mois après avoir défendu sa thèse à l’Université de Kinshasa et sans avoir été nommé Professeur. Plus grave, le Professeur qui dispensait ce cours, vice-doyen de son état, aurait été surpris, la semaine dernière, de le trouver dans l’auditoire en train de dispenser son cours qu’il enseigne depuis des années. C’est dire qu’il n’aurait pas été informé de ce changement par le comité de gestion. Quelle humiliation!
En ce qui concerne la nomination des assistants, de sources proches de l’Administrateur du Budget de l’IFASIC, Prof Raphael Kidimu, renseignent qu’aussitôt nommés, les nouveaux assistants, quatorze pour être précis, auraient touché leur salaire. Certains d’entre eux auraient été nommés dans les jurys tandis que d’autres ont eu la charge de corriger les papiers des examens. Pourtant, les règles en vigueur dans l’ESU stipulent, en substance, qu’un nouvel assistant doit être soumis à une période probatoire d’une année à deux ans avant de se voir confier ce genre de responsabilités. Entre temps, certains assistants régulièrement nommés depuis plusieurs années attendent leur premier salaire et ne savent pas encore ce qui se fait dans un jury pour n’y a avoir jamais foulé leur nez. Un d’entre eux raconte que la seule responsabilité qui lui a été confiée, à trois ans d’assistanat, reste le statut d’encadreur de stagiaires. Il ajoute qu’il n’a reçu qu’une modique somme de 10 USD pour ce travail.
UPP ou le summum de la mégestion
Pour en savoir davantage, les journalistes d’ALTERNANCE.CD se sont intéressés à la cellule en charge des stages de l’IFASIC appelée Unité des Pratiques Professionnelles (UPP), dirigée par le Professeur Ndeke, secondé par deux maitres de stage en charge respectivement du 1er et 2ème cycle.
Grande fut leur stupéfaction de découvrir que depuis des années, les points de stage seraient monnayés à l’IFASIC. En français facile, on dirait que les points de stage envoyés par les organes de presse ne sont pas pris en compte. Ce n’est pas la comparaison des points de stage des stagiaires envoyés par deux journaux dont nous taisons les noms, pour l’année académique 2019-2020 et ceux venus du jury qui dira le contraire. Quel scandale!
Plus grave et c’est à ce niveau que l’on pourrait parler de mauvaise gestion, alors que chaque étudiant qui va en stage est obligé de payer la somme de 35000 FC dont une partie devrait être remise aux encadreurs tant de l’institution que des organes qui accueillent les stagiaires, l’IFASIC n’envoie plus rien aux maisons de presse depuis deux ans. Même ses propres assistants chargés d’encadrer les stagiaires se plaignent de ne rien toucher. En plus, aucun document officiel sur la gestion de cet argent ne serait disponible, ce qui est inquiétant quand on sait que chaque année, ce sont de milliers d’étudiants qui payent chacun la somme précitée. Un membre de l’UPP interrogé à ce sujet a renvoyé nos journalistes au Comité de gestion.
Alternance.CD a entrepris de démarches auprès des membres du comité de gestion de l’IFASIC pour avoir leur version des faits avant de publier les deux volets restants de cette enquête. Le prochain épisode sera consacré à la sous-évaluation des effectifs et au flou entretenu sur la gestion des comptes de l’IFASIC logés dans deux banques. Vous saurez également tout sur le criterium de la réussite à l’IFASIC.
Le troisième volet se penchera sur la gestion des frais de quotité pourtant suspendu par le Premier ministre sortant Sylvestre Ilunga, mais que l’IFASIC continuerait de percevoir en toute illégalité. Vous y découvrirez également quelques noms des étudiants qui ont défendu leurs TFC sans avoir réussi ou encore la vérité sur la porte du bureau d’un membre du comité de gestion qui a été surfacturée à 3000 USD alors que dans tout Kinshasa, une porte ordinaire ne dépasse pas 250 USD.
Junior Lomanga