Après son alerte sur les massacres de Kapupu, le Dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la paix 2018, est la cible des menaces de tous genres. Des personnes, pour la plupart inconnues, lui promettent le pire à lui et à certains de ses proches via des messages anonymes. Sur les réseaux sociaux, on assiste à des messages qui visent à l’intimider.
Ces menaces sont prises très au sérieux par les congolais épris de paix et de patriotisme. C’est le cas des intellectuels tels que l’écrivain Père Germain Nzinga et le Prof. Alphonse Maindo de l’Université de Kisangani.
Dans une réflexion, le premier cité estime que le médecin directeur de l’hôpital général de référence de Panzi dérange notamment la meute qui tue en toute impunité à l’est de la République Démocratique du Congo.
Il est convaincu que l’objectif de ceux qui s’en prennent au Dr. Denis Mukwege est de prendre le contrôle du Congo et de ses richissimes ressources naturelles après avoir nettoyé des congolais et obtenu le silence de ceux qui restent vivants. « Il dérange ce régime qui a développé l’habitude de prendre pour cible toute élite intellectuelle congolaise qui ose marcher à contre-courant de leur agir criminel », affirme-t-il.
Pour lui, le Prix Nobel de la Paix est devenu un témoin gênant, tellement qu’il a vu et entendu beaucoup d’horreurs perpétrées en toute impunité sur des paisibles citoyens dont de femmes et des enfants et qu’il les dénonce chaque jour.
Les plans de ses pourfendeurs démasqués
Partant de ce constat, l’écrivain Père Germain Nzinga compare compare ces menaces au prisme de la théorie de Jacques Semelin qui explique le mode opératoire des génocidaires dans « Usages politiques des massacres et génocides ».
En effet, cet auteur met en nu la manière dont les manipulations de langage et des esprits préparent au passage à l’acte. Il est notamment question d’élaborer préalablement un imaginaire et une justification.
Ainsi, avant de s’attaquer à un individu ou à un peuple, les assassins se lancent dans une campagne de dénigrement. Pour ce faire, ils choisissent leur adversaire en le chargeant de tous les maux imaginaires. Au finish, l’opinion risque de croire que seule sa disparition finale peut rétablir l’ordre social qu’il a brisé.
Du coup, le Père Germain Nzinga attire l’attention de l’opinion sur le fait que « cette campagne haineuse contre le médecin congolais est à prendre au sérieux » et qu’elle est « indicatrice du projet échoué en 2012 lorsque les mêmes sicaires avaient décidé de mettre fin à sa vie« . Il émet des craintes que cette campagne soit menée pour préparer les esprits au pire qui pourrait s’abatre sur le Dr Denis Mukwege. D’où son appel à ouvrir l’œil et à doubler de vigilance.
Cette analyse est partagée par Prof Alphonse Maindo de l’Université de Kisangani. Citant l’historien Georges Mosse, auteur de l’ouvrage « De la grande guerre, la brutalisation des sociétés européennes », il croit que ce travail de mobilisation culturelle joue un rôle crucial dans les tueries, les massacres, les assassinats etc.
Il relève que comme l’avait démontré Georges Mosse, les pourfendeurs construisent l’image de l’ennemi en le présentant comme un objet, un animal, un insecte, bref, le déshumanise pour faciliter sa mise à mort étant donné qu’il n’est pas question de tuer son semblable.
En définitive, Prof Alphonse Maindo pense que la mobilisation culturelle contre Dr. Denis Mukwege, y compris les Bashi, est dangereuse et que par conséquent, il faut la prendre au sérieux.
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