Quatre jours après la tenue d’ « une réunion cordiale et productive sur la coopération bilatérale et régionale » entre le Président congolais Félix Tshisekedi et son homologue Rwandais Paul Kagame, en Jordanie, les FARDC accusent l’armée rwandaise d’avoir attaqué ses positions à Tchanzu et à Runyoni, en appui aux rebelles du M23, dans le territoire de Rutshuru au Nord-Kivu. En réaction, le Porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya a dénoncé une attitude hypocrite du gouvernement du Rwanda et annoncé que l’ambassadeur rwandais à Kinshasa serait convoqué ce mardi 29 mars 2022 au ministère des Affaires étrangères.
Un temps annoncés distants l’un de l’autre, suite aux nombreux incidents sécuritaires à la frontière entre leurs deux pays et aux déclarations des officiels Rwandais, Félix Tshisekedi et Paul Kagame se sont finalement rencontrés de nouveau le 24 mars dans le cadre du processus d’Aqaba sur l’Afrique de l’Est, à l’invitation de Sa Majesté Abdullah II de la Jordanie.
La presse présidentielle a vanté la productivité et la cordialité de la réunion entre les deux Chefs d’État sur la coopération bilatérale et régionale.
Deux militaires rwandais capturés
Quatre jours plus tard, les Forces Armées de la République Démocratique du Congo ont annoncé que, dans la nuit du 27 au 27 mars 2022, le M23 soutenu par les forces de défense du Rwanda, les RDF, a mené des incursions et attaqué les positions des FARDC de Tchanzu et Runyonyi dans le territoire de Rutshuru.
« Au cours de ces attaques, les Forces Armées de la République Démocratique du Congo ont mis la main sur deux militaires rwandais. Il s’agit de l’adjudant Habyarimana Jean-Pierre, matricule AP 27779, et du soldat de rang Uwajeneza Muhindo John, alias Zaje, tous du 65 ème bataillon de la 402 ème brigade des forces de défense du Rwanda. Ces deux sources crédibles précisent le nom de leur unité et l’identité de leurs commandants de bataillon et de brigade. Le 65 ème bataillon et la 402 ème brigade commandés respectivement par le lieutenant-colonel Burundo Joseph et le Général Nkubito Eugène sont basés à Jarama, au camp militaire Kibungo au Rwanda », ont expliqué les FARDC.
Logiquement, les forces armées congolaises « s’interrogent sur le sens de la mutualisation des efforts en vue des opérations conjointes avec un partenaire qui ne respecte ni ses engagements vis-à-vis de la RDC, encore moins sa propre parole à l’occasion de différentes rencontres et échanges entre leaders à tous les niveaux ».
A l’instar des FARDC, le ministre de la communication et médias se désole du manque de sincérité du Rwanda.
La réaction de Fatshi attendue
Sur le plateau de TV5 Monde, Patrick Muyaya a eu des mots justes à l’égard du pays de Paul Kagame.
« Il faut condamner cette énième incursion parce que ce n’est pas la première fois. Je me souviens qu’en octobre dernier ou en novembre il y a eu des attaques de ce genre. L’armée qui suit les événements sur terrain nous a versé des éléments. Quoi qu’il en soit, nous condamnons cette attitude et quoi qu’il en soit, nous pensons qu’il est temps de mettre fin à cette forme d’hypocrisie ou de complicité qui existerait entre le M23 et le gouvernement du Rwanda. Parce que nous, nous voulons regarder le Rwanda comme un pays partenaire autant nous regardons l’Ouganda », a-t-il vociféré.
Il a poursuivi qu’en adhérant à la Communauté des États de l’Afrique de l’Est, la République Démocratique du Congo est déterminée à construire de relations de paix pour consolider l’économie entre les États et faire finalement de la région de Grands Lacs une région qui va permettre le développement et le décollage de toute l’Afrique.
« Et donc, dès demain, par rapport aux affirmations que l’armée a faites ce soir, mon collègue des Affaires étrangères invitera l’ambassadeur du Rwanda pour qu’il vienne nous donner des explications sur cela et voir dans quelle mesure on peut durablement régler ce problème avec le M23, ce groupe résidu qui continue à semer la terreur et la désolation dans cette partie du pays », a annoncé le Porte-parole du gouvernement.
Reste à savoir si le président de la République, Félix Tshisekedi Tshilombo aura le même discours envers son « frère » et homologue Rwandais Paul Kagame.
Néanmoins, les FARDC ont tenu à rassurer la population que quoi qu’il arrive, elles « ne laisseront aucun centimètre » du territoire national sous occupation d’une quelconque rébellion.
Elles ont souligné que, dans la conduite des opérations, « elles vont accomplir leurs missions constitutionnelles avec détermination, dans le strict respect de leur serment de ne jamais trahir le Congo ».
Jean Pérou Kabouira