Bruno Tshibala et son directeur de cabinet, Michel Nsomue Nsomue doivent justifier la destination qu’ont prise les six millions des dollars américains de salaires des membres du cabinet et sept millions huit cent mille dollars américains de frais de fonctionnement dont on n’a aucune trace à ce jour. Ce sont des sommes astronomiques, qu’ils sont soupçonnés d’avoir détournées depuis octobre 2017. Deuxième volet de notre série de publications sur la gestion peu orthodoxe de la primature par l’ancien bras droit d’Etienne Tshisekedi.
Un conseiller à la Primature qui n’arrive pas à payer le loyer, c’était inimaginable il y a une année! Et pourtant, c’est ce qui arrive fréquemment au bon nombre de 103 conseillers du Premier ministre actuel. En janvier dernier, chacun d’entre eux a gagné 700 000 Francs congolais de salaire, le double de 350 000 FC empochés par chacun des 130 chargés d’étude. Au mois d’octobre 2017, ces chiffres étaient de 300 000 FC pour un conseiller et 150 000 FC pour un chargé d’étude. Comment justifier cette situation
Pour répondre à cette question, nous avons demandé et obtenu une copie du barème des salaires et primes, assorti d’une clause de couvrir les noms de nos sources par l’anonymat. Et d’après ce document ultra secret, le salaire et prime mensuels d’un conseiller s’élèvent à 4 600 000 FC (quatre millions six cent mille francs congolais), deux millions quatre cent mille pour un Chargé d’étude. Mais, aucun des 50 conseillers interrogés au cours de l’enquête n’a reconnu avoir touché ne serait que la moitié de ce montant, de quoi déduire que ces sommes ont bel et bien pris d’autres destinations que celle pour laquelle elles étaient destinées.
Pour en savoir plus, petit tour dans un bureau huppé de la Primature où nous attendait depuis une demi-heure, une dame que nous avons surnommée XXL en référence à sa corpulence athlétique. Derrière ses lunettes de vue et avec un français académique frappé d’un accent luba, elle explique ce qu’elle décrit comme « la machine à voler » qui, serait mise en place par Michel Nsomue. « Les missions de service sont le domaine privilégié des enfants du Chef et de son dircab ainsi que leurs amis. Les salaires varient d’un mois à l’autre selon leurs humeurs et besoins. Moi-même j’ai raté de voyages à plusieurs reprises », fustige-t-elle.
Interrogée sur sa rémunération, elle se montre nerveuse et répond brièvement que « Shetani »-un surnom donné au Dircab-lui donne à elle et à ses collègues « ce qu’aucun de Premiers ministres qui ont précédés Tshibala ne pouvait se permettre de donner à ses collaborateurs ».
Afin d’avoir un autre son de cloche, nous avons approché un proche de ce dernier et sa réponse était expéditive: « il n’y a pas de frais de fonctionnement car, Samy Badibanga avait tout utilisé ». Alors que l’on cherche à lui montrer une copie de preuve de décaissement de la Banque Centrale pour le compte de la Primature, ce trentenaire Songe s’éclipse à la manière du vent.
Bras de fer entre le Dircab et le Dircaba Eco
Accusé d’être le cerveau moteur de ce vol institutionnalisé, Michel Nsomue Nsomue se montre jusque-là imperturbable. Toutes nos tentatives pour obtenir sa réaction ont échoué et, l’on s’est contenté de compter ses véhicules et maisons à Kinshasa.
Sans surprise, l’ancien fonctionnaire de la Banque Centrale du Congo accumule à lui seul et aux membres de sa petite famille, sept véhicules de service dont deux Toyota Fortuner pour deux de ses fils. « Les missions de service à l’étranger sont effectuées par lui-même, ses enfants ou ceux du Chef, son protocole et même le comptable. Les autres se contentent de missions de service à l’intérieur du pays pour les plus chanceux », explique une source interne.
D’autre part, Miche Nsomue est en conflit ouvert avec l’un de ses adjoints, le Directeur de cabinet adjoint en charge de l’Economie. Ce dernier se trouverait dans tous ses états depuis qu’il a appris que, son antichambre bénéficie de moins d’avantages financiers que d’autres antichambres et surtout que les membres du Cabinet sont sous payés depuis l’arrivée de Bruno Tshibala à la primature.
« Il a vu le Premier Ministre plusieurs fois pour lui faire part de ses inquiétudes mais ce dernier ne réagit pas. On ne peut pas comprendre qu’il ne puisse pas être au courant de tous les chiffres, lui qui censé s’occuper des questions économiques de la Primature », affirme une source proche du dossier. Nous y reviendrons avec d’autres révélations dans le troisième volet sur la gestion de la Primature par Tshibala.
Jean Pérou Kabuira