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Investissements : Le Dr Georges O. Lohalo révèle l’apport mesquin des États-Unis en RDC

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Georges O.  Lohalo est convaincu que l’implication de la Chine pour la stabilité de l’Est de la République Démocratique du Congo est une bonne nouvelle pour l’économie congolaise.

Au cours d’une interview accordée à alternance.cd, il a analysé la récente exhortation du représentant permanent adjoint  chinois auprès de l’ONU, demandant aux groupes armés à l’Est de déposer les armes. Passant en revue la coopération bilatérale  entre la Chine et la RDC depuis les années 60 à ce jour, ce chercheur en relations Sino-américaines et en coopération Sino-congolaises  soutient que le Président Félix Tshisekedi a compris, par rapport à la guerre dans l’Est, qu’il fallait impliquer tous les  acteurs locaux, régionaux et internationaux – notamment la Chine, qui a toujours été aux côtés de la République Démocratique du Congo – pour une solution idoine à cette barbarie qui dure depuis bientôt 30 ans.

Pour rappel, intervenant à l’occasion de l’examen du dernier rapport du Secrétaire Général des Nations Unies sur la situation en République Démocratique du Congo, le représentant permanent adjoint chinois auprès de l’ONU, Dai Bing, a condamné, au nom de son pays, les violences dans la partie Est de la RDC.

ll a exprimé l’appui de la Chine au gouvernement congolais et exhorté les groupes armés qui sèment la terreur et la désolation à l’Est du pays à déposer immédiatement les armes et à respecter les appels à la paix.Dai Bing a insisté sur la nécessité et l’urgence de voir le Conseil de sécurité répondre positivement à la demande du gouvernement congolais de lever l’embargo sur les armes.

Pour le Docteur Georges O. Lohalo, « le soutien chinois offre au gouvernement congolais une opportunité de continuer les discussions parce qu’il a désormais et officiellement un soutien de taille au Conseil de sécurité des Nations Unies ».

Avec le volume des investissements chinois et américains en RDC, il affirme que « même si la Chine offre plus d’opportunités à la RDC que ne lui en offrent les États-Unis, il ne faut pas inutilement opposer les deux pays ».

Georges O. Lohalo insiste sur le fait que le gouvernement congolais ne devrait pas opposer la sécurité à l’économie.« Personnellement, a-t-il expliqué, je propose au gouvernement congolais d’appliquer la philosophie du pragmatisme ». Elle consiste, dans son entendement philosophique et pratique, pour la RDC, à inaugurer « une diplomatie pragmatique pour la stabilité : être capable de travailler avec les américains pour les aspects sécuritaires, mais en même temps avec les Chinois pour les impératifs économiques, infrastructurels et sociaux, sans oublier ceux légaux, qui intéressent plus les Européens ». 

Lire aussi RDC: Pourquoi le Président Félix Tshisekedi devrait-t-il se rendre en Chine? (Tribune du Doctorant Georges Lohalo)

Georges O. Lohalo est Docteur en Relations Internationales de Central China Normal University. Il étudie le système international post guerre froide, la compétition Sino-Americaine, la coopération Sino-congolaise et la stabilité et l’instabilité en Afrique du Milieu. Il est auteur de plusieurs articles scientifiques et opinions dont « Pourquoi le Président Félix Tshisekedi devrait visiter la Chine, Alternance.cd, Mai, 2019 ». Lire l’intégralité de l’interview.

ALT: Après la 77ème Assemblée générale des Nations Unies où Félix Tshisekedi, Chef de l’Etat congolais, a dénoncé l’agression de son pays par le Rwanda, la Chine a exprimé son appui au gouvernement congolais et exhorté les groupes armés à déposer immédiatement les armes. Que vous inspire cette position de la Chine ?

Georges O. Lohalo : La déclaration chinoise du soutien au gouvernement congolais m’inspire cohérence à deux niveaux. En premier lieu, par rapport à la logique même de sa politique étrangère. La Chine a toujours soutenu l’intégrité territoriale parce qu’elle est confrontée à ce même souci dans son environnement immédiat. Vous savez, depuis 1945, elle lutte pour récupérer Taiwan, insiste sur la non autonomie du Tibet, du Xinjiang et peine à faire reconnaitre ses prétentions en mer de Chine qu’elle partagerait avec d’autres pays de la région dont le Vietnam, les Philippines et le Japon.

Donc, en affirmant soutenir le Congo, la Chine réaffirme ses principes diplomatiques de longue date.En second lieu, elle se pose en amie du Congo au moment où le Congo en a plus besoins d’amis sincères. Est-il aussi vrai que, depuis bientôt 12 ans, la Chine est le partenaire économique et commercial privilégié de la RDC. Depuis le contrat Sino-congolais à partir desquels était créée la Sicomines, il s’est développée une complicité entre les deux gouvernements en termes de soutiens mutuels dans les organisations internationales. Le gouvernement congolais vote pour la Chine dans les institutions internationales et la Chine le fait réciproquement. C’est aussi cohérent qu’en condamnant l’instabilité à l’Est de la RDC, la chine protège ses intérêts et ses citoyens en RDC.

Le gouvernement chinois a beaucoup d’investissements ici, et la Chine ne voudra pas voir le Congo exploser au risque de ressembler au cas libyen où elle a perdu des milliards d’investissements quand Kadhafi était lâchement tué. 

La Chine a demandé au Conseil de sécurité des Nations Unies de lever l’embargo sur l’achat des armes par la RDC. Pensez-vous que la Chine serait prête à aller à l’encontre de cet embargo au cas où il n’était pas levé comme elle le souhaite ?

Je ne pense pas que la Chine agirait à l’encontre de l’embargo pour la simple raison que ça tient au fonctionnement même du Conseil de sécurité des Nations Unies. Étant donné que tous les pays membres permanents ont le droit de veto, il suffit qu’un pays oppose son droit de veto pour qu’une résolution ne puisse passer, y compris celle qui lèverait l’embargo sur les armes en RDC.

Pour rappel, l’embargo dont il est question est issue d’une résolution de 2008 qui avait pour objectif de limiter les armes dans cette région en crise, pour éviter l’embrasement, parce que la logique était qu’à l’époque, la plupart d’armes qui entraient en RDC se retrouvaient facilement entre les mains des rebelles issus des groupes armés. Parce que certains généraux se compromettaient en vendant des armes comme indiquent différents rapports des Nations Unies.

Par ailleurs, la Chine voudra voir ces homologues au conseil de sécurité suivre son exemple parce que l’urgence aujourd’hui consiste à réconcilier la limitation de la circulation des armes dans la région à l’impératif de la paix qui naîtrait de la responsabilisation de l’Etat congolais. Aussi longtemps que le gouvernement congolais manquerait les capacités nécessaires pour assurer sa défense et faire régner la loi dans cette région, il est illusoire d’espérer véritable paix en Afrique du milieu. La Chine se donne donc la mission de conscientiser ses homologues pour une véritable paix et sécurité internationales qui sont les objectifs primaires de l’ONU.

Ça fait quatre ans que les États-Unis déclarent leur amour à la RDC avec sur le terrain, pas de résultats à la hauteur de cet amour. La RDC doit-t-elle garder la Chine comme son partenaire phare, notamment dans le domaine des infrastructures ?

Je ne sais pas ce que vous entendez par « déclarer son amour pour la RDC ». Ce que je sais est que la situation que traverse la RDC aujourd’hui ou depuis les années 90 fait qu’elle ait besoin des États-Unis, de la Chine et de tous les partenaires qui peuvent apporter quelque chose pour: mettre fin à l’instabilité de l’Est(i);   revigorer son économie (ii); construire les routes(iii); etc. afin que le Congo reprenne sa vocation naturelle d’Etat pivot au cœur de l’Afrique. Franck Fanon ne disait-il par « l’Afrique a la forme d’un revolver dont la gâchette se trouve au Congo » ?

Par rapport aux impératifs sécuritaires, le Président Félix Tshisekedi a compris qu’il fallait impliquer tous les acteurs clés locaux, régionaux et internationaux pour endiguer cette instabilité de l’Est qui dure depuis bientôt 30 ans. C’est avec raison parce qu’il avait promis aux congolais de terminer la guerre une fois au pouvoir. Cette donne justifie l’état de siège, les différentes opérations militaires avec les pays voisins et la signature de l’accord de partenariat stratégique avec les USA. Si les USA sont utiles pour l’aspect sécuritaire la chine l’est vivement pour les impératifs économiques et sociaux. Il est inutile d’opposer la sécurité à l’économie. Personnellement, je propose au gouvernement congolais d’appliquer le pragmatisme. Dans son entendement philosophique et pratique, le Congo devrait se positionner en acteur pour tirer profit de toutes les opportunités qu’offre le système international du 21e siècle.

Lire également Infrastructures : Félix Tshisekedi réitère sa confiance au programme Sino-Congolais

Ce qu’il faut au Congo aujourd’hui, c’est une diplomatique pragmatique pour la stabilité : être capable de travailler avec les américains pour les aspects sécuritaires, mais en même temps avec les chinois pour les impératifs économiques, infrastructurels et sociaux, sans oublier ceux légaux qui intéressent plus les européens. Il est d’une importance vitale pour le Congo d’avoir des institutions stables pour appliquer cette politique étrangère pragmatique.

Le Congo ne devrait pas tomber dans le piège de se choisir un camp. L’exemple du Zaïre de Mobutu renseigne mieux : de 1965 à 1990 l’URSS n’était à nul égard notre ennemi. A la fin de la bipolarité Mobutu fit chassé du Zaïre car devenant encombrant : l’enjeu du Congo demeure la construction d’un véritable Etat pour la stabilité de l’Afrique.

Qu’est-ce que la Chine offre à la RDC que les États-Unis ne peuvent pas lui offrir ?

La Chine offre beaucoup d’opportunités aujourd’hui à la RDC : les investissements et aides, les échanges commerciaux, les échanges culturels, etc. Elle investit dans des secteurs clés à l’occurrence télécommunication, énergie, agricole, mines etc. ; elle apporte des aides diverses sans conditionnalités notamment les 35 millions en 2010 pour la connexion de la RDC à la fibre optique et l’Institut culturel africain en cours de construction en face du parlement ; les échanges économiques entre les deux pays envoisinent 280 millions de dollars en 2022 ; chaque année l’Etat Chinois accorde des bourses d’études aux jeunes congolais sans oublier l’institut Confucius à l’académie diplomatique congolaise qui a déjà formé plus de 500 jeunes congolais en 4 ans d’existence. Disons que la coopération Sino-congolaise est réelle et visible.

Sur le même sujet Coopération Sino-congolaise: Fructueux échanges entre Christophe Lutundula et Wang Yi à Dakar

Par ailleurs, même si la Chine offre plus d’opportunités au Congo que les États-Unis, il serait inutile d’opposer les deux pays. Ils sont capables de travailler ensemble, de coopérer pour la stabilité du Congo. Ils le font dans beaucoup de domaines : Teke Fungurume Mining est passée des mains des américains aux mains des Chinois ; ils coopèrent pour la protection du bassin du Congo pour lutter contre le réchauffement climatique ; les deux pays assistent le Congo pour que ce dernier développe des capacités autonomes afin de lutter contre les pandémies. 

Comment envisagez-vous les perspectives de la Coopération Sino-congolaise dans les prochaines années ?

L’avenir de la coopération Sino-congolaise dépend des congolais au mieux du gouvernement congolais. Comme le disait Kä Mana (LePotentiel 2009), l’immortel de la pensée congolaise aujourd’hui passé à l’éternité, l’orientation que la Chine donnera à sa présence en Afrique dépendra de ce que nous serons nous-mêmes dans la gestion de nos relations avec ce pays.

Pour lui, l’enjeu capital du partenariat stratégique avec l’empire du milieu touche également celui de l’imaginaire et de la représentation de soi. L’irruption de la Chine dans la trajectoire historique congolaise est une opportunité de mener une réflexion collective sur soi et sur la place que la RDC pourrait occuper dans le système international du 21e siècle. Autrement dit, le succès de la coopération Sino-congolaise est fonction du projet congolais. IL Y A URGENCE !

Propos recueillis par Junior Lomanga

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