Interpellé depuis quelques jours, le Directeur Général de Safricas Congo Sa, David Éric Blattner est toujours détenu à l’ex-prison centrale de Makala. Poursuivi notamment pour abus de confiance, ajournement et changement de planning des travaux de saut-de-mouton prévus dans le cadre du programme de 100 jours du Président de la République, la lumière jaillit autour de son arrestation. Proche du dossier, Maitre Laurent Onyemba estime qu’il est incompréhensible que cette personnalité soit toujours aux arrêts après avoir justifié l’utilisation des acomptes perçus.
C’est une affaire qui a fait et qui fait encore beaucoup de bruits en République Démocratique du Congo. En avril 2019, Safricas Congo Sa avait signé avec l’Office de Voirie et Drainage(OVD) un contrat de marché public en vue de la construction de quatre saut-de-mouton à Socimat, RTNC, Triomphal et UPN à Kinshasa pour un coût global de 13.397.026,18 USD.
En exécution de ces contrats, l’OVD a versé des acomptes représentant 47,5% du marché auxquels ont été amputés 11,7% de l’OVD. Selon Safricas, les sommes perçues ont permis le démarrage des travaux sur les sites de la RTNC et Socimat et l’achat des structures métalliques et les accessoires pour tous les quatre ouvrages.
Trois questions récurrentes préoccupent la justice dans cette affaire pour justifier la prévention d’abus de confiance mise en charge de Blattner. Il s’agit de celles de savoir pourquoi n’a-t-il pas commencé les travaux de construction de saut-de-mouton de l’UPN et Triomphal ; pourquoi avoir modifié le planning d’exécution des travaux et en quoi auraient effectivement servi les acomptes perçus pour ces deux sites?
A la première question, Maitre Laurent Onyemba évoque un arrangement avec l’autorité contractuelle pour éviter les embouteillages. «Safricas relève avoir démarré et terminé les études de géotechniques et d’impact environnemental prévues au contrat, elle a obtenu l’accord du Maitre d’ouvrage délégué qui lui a notifié par écrit l’ajournement des travaux pour les deux sites concernés en vue d’éviter les embouteillages susceptibles d’axphyxier toute la ville», explique-t-il.
La thèse du détournement non soutenable
Concernant le changement du planning d’exécution des travaux, il révèle que l’importation et le dédouanement des structures métalliques ainsi que leurs accessoires ont été dictés par l’urgence des travaux du fait que leur livraison nécessité un temps relativement long. «En juillet 2019, le DG de l’OVD et deux conseillers de la présidence ont effectué une descente en Afrique du Sud pour s’assurer de l’effectivité de la commande et surtout de la production des structures métalliques en cause et leurs accessoires. Ces matériaux dont le coût contractuellement connu sont arrivés à Kinshasa et entreposés dans les installations de Safricas Congo Sa ainsi qu’il ressort de la descente sue les lieux effectuée par les inspecteurs requis et le bureau technique de contrôle du ministère des infrastructures, travaux publics et reconstruction en date du 20 février 2020», fait savoir Maitre Laurent Onyemba.
D’où pour lui, « le changement de planning d’exécution des travaux connu par l’autorité contractuelle ne peut justifier la prévention d’abus de confiance vanté contre Blattner d’autant plus que les matériaux achetés sont destinés aux chantiers et non à d’autres fins personnelles de l’inculpé».
Au sujet de l’affectation des sommes perçues, il soutient que la thèse de détournement fondée sur les préoccupations évoquées plus haut n’est soutenable au regard du droit pénal dont l’interprétation est restrictive. «Tant les acomptes perçus au 15 octobre 2019 que ceux ajoutés durant la détention de Monsieur Blattner en février 2020 totalisant un montant global de 7.335.256,47 USD sur 13.397.026,18 USD, les justificatifs sont clairement donnés ainsi que les pièces du dossier pour les chantiers où les travaux ne sont pas à l’arrêt»,précise Maitre Laurent Onyemba.
Et de renchérir que dans la mesure où Blattner a une résidence connue et que sa fuite n’est pas à craindre étant donné qu’il a son principal centre d’intérêts économiques en RDC, «il mérite d’être mis en liberté provisoire».
Sinon, on ne serait pas loin, à en croire ce juriste, d’une justice rendue en fonction des origines de justiciables.
Jean Pérou Kabouira